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Bruno Sibilli est rapporteur public à la Cour administrative d’appel de Paris.
Rapporteur public à la Cour administrative d’appel de Paris
Bruno Sibilli est rapporteur public à la Cour administrative d’appel de Paris.
#Mots-clés: Plus-value, Plus-value sur titres, Opération d’échange, Report d’imposition, Option, Abattement pour durée de détention
#Article du CGI/LPF: 92 B, 150-0 D
Les présentes affaires portent sur l’application de l’abattement de 65 % en raison de la durée de détention aux plus-values réalisées lors de l’échange d’actions antérieurement au 1er janvier 2000 et placées en report d’imposition jusqu’à leur cession.
La CAA rappelle que les plus-values réalisées antérieurement au 1er janvier 2013 et placées de plein droit en report d’imposition en application du II de l’article 92 B et du I ter de l’article 160 du CGI et afférentes à des opérations entrant dans le champ matériel et territorial de la directive « fusions » du 19 octobre 2009 bénéficient, en cas d’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu, de l’application de l’abattement pour durée de détention prévu au 1 de l’article 150-0 D alors que celles afférentes à des opérations qui ont été placées, sur option, en report d’imposition au titre des mêmes dispositions, lorsqu’elles ne mettent en cause que des sociétés établies en France, n’en bénéficient pas.
La CAA de Paris rejette, conformément aux conclusions du rapporteur public Bruno Sibilli, l’intégralité des moyens soulevés.
La CAA juge que les requérantes ne sauraient se prévaloir du principe d'égalité affirmé par l'article 20 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, pour contester l'imposition à laquelle ont été soumises les plus-values réalisées sans abattement pour durée de détention.
Elle juge également, sans estimer qu'il soit besoin de surseoir à statuer jusqu'à la décision à venir de la Cour européenne des droits de l'homme, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations combinées de l'article 14 de la Convention EDH et de l'article 1er de son premier protocole additionnel doit être écarté.
#Mots-clés: Plus-value, Plus-value sur titres, Apport de titres, Sursis d’imposition, Holding animatrice, Abattement renforcé, âge, Date de création, dix ans
#Article du CGI/LPF: 150-0 D
La question posée dans la présente affaire est celle de l’appréciation, pour une holding et chacune de ses sociétés filles, de la condition d’ancienneté d’au plus de dix ans à la date de souscription ou d’acquisition des titres pour le bénéfice de l’abattement de 85 % prévu par le 3° du A du 1 quater de l’article 150-0 D du CGI.
Les requérants ont, entre 1989 à 2000, fondé quatre sociétés d’ambulance. Le 12 janvier 2005, ils ont notamment apporté à une holding animatrice des titres de ses sociétés. Le 28 mars 2014, plus de huit ans après leur acquisition, ils ont cédé les titres reçus en échange de cet apport et appliqué l’abattement de 85 % prévu par le 3° du A du 1 quater de l’article 150-0 D du CGI sur la plus-value réalisée.
Par une proposition de rectification du 13 octobre 2016, l’administration fiscale a remis en cause cet abattement renforcé et lui a substitué l’abattement de 65 % prévu par le b) du 1 ter de l’article 150-0 D. Le TA de Paris, par un jugement du 12 juillet 2023, a confirmé la position de l’administration.
La CAA de Paris, suivant les conclusions du rapporteur public, confirme le jugement du TA et rejette la requête présentée.
La CAA rappelle que l’abattement prévu par le A du 1 quater de l’article 150-0 D du CGI est subordonné, notamment, à la condition que la société dont les titres ou droits sont cédés ait été créée depuis moins de dix ans à la date de leur souscription ou de leur acquisition. Lorsque la société émettrice des titres ou droits cédés est une société holding animatrice (CGI, art. 199 terdecies-0 A), le respect de cette condition doit être apprécié, à la date d’acquisition des titres de cette société, non seulement à son niveau, mais également à celui de chacune des sociétés dont elle détient des participations. Il en va ainsi notamment lorsque les titres de la société holding ont été acquis à l’occasion d’une opération d’apport à cette société de titres d’une autre société.
La cour précise en outre que la circonstance, dans cette hypothèse, que l’opération n’ait donné lieu à aucune taxation immédiate, celle-ci n’intervenant, en application du 9 de l’article 150-0 D du CGI, que lors de la vente ultérieure des titres de la société holding reçus en échange, le gain net étant alors calculé à partir du prix d’acquisition des titres remis à l’échange conformément au 2° de 1 quinquies du même article, est à cet égard dépourvue de toute incidence
En l’espèce, la cour relève que si les requérants ont acquis les titres de la holding animatrice par apport des titres détenus dans quatre sociétés, moins de dix ans après la création de cette société, celle-ci détenait, le 12 janvier 2005, date de cette acquisition, des titres de deux de ces sociétés, qu’elle avait elle-même acquis le 15 novembre 2004. Elle relève également que ces deux sociétés d’ambulance dont la holding détenait des titres depuis 2004, ont été créées respectivement les 9 novembre 1989 et 24 septembre 1992, soit plus de dix ans avant la date d’acquisition par les requérants des titres de la société holding.
La CAA juge dès lors que la condition prévue par le 1° du B du 1 quater de l’article 150-0 D du CGI visant à bénéficier de l’abattement renforcé de 85 % n’était pas satisfaite.
La cour précise, par ailleurs, qu’est sans incidence la circonstance que la plus-value réalisée par les requérants lors de l’apport à la société holding de leurs titres de ces sociétés n’ait pas été immédiatement taxée, l’opération d’apport ayant été placée sous le régime de sursis d’imposition (CGI, art. 150-0 B).
Annexe 3 : CAA Paris, 9e ch., 11 oct. 2024, n° 22PA03139, Min. c/ Lebel, concl. B. Sibilli, C+
Annexe 1 : CAA Paris, 9e ch., 10 nov. 2023, n° 21PA02584, Galbert, concl. B. Sibilli, C
Annexe 8 : CAA Paris, 9e ch., 3 févr. 2023, n° 22PA00288, Sitbon, concl. B. Sibilli, C