#Mots-clés: Coopération administrative, assistance administrative internationale, Échange de renseignements, Échange automatique de renseignements, droits du contribuable
#Auteur: Nicolas¤ VERGNET
#Qualités: Maître de conférences, Université Paris Panthéon-Assas
#Auteur: Cécile¤ ROBIN
#Qualités: Responsable fiscale au sein d’un groupe international
Les évolutions récentes en matière de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ont mis en lumière une volonté croissante des États et des organisations internationales de promouvoir la transparence, s’incarnant pour partie dans le développement, la densification et l’intensification des mécanismes d'échange automatique d'informations. Cette évolution va de pair avec celle du souci croissant de protéger les données personnelles des contribuables et le secret de leurs affaires, et pose d’évidentes questions sur la compatibilité de ces deux mouvements en apparence contradictoires (V. § 1 à § 8).
En premier lieu, si les données fiscales sont indéniablement des « données personnelles » dignes de la protection particulière dont bénéficient ces dernières (dès lors qu’elles sont susceptibles de comporter des détails sur la vie économiques et professionnelle des contribuables), l’étendue de cette protection varie selon les types de contribuables : elle ne fait pas de doutes pour les personnes physiques mais relève bien moins de l’évidence pour les personnes morales qui ne se sont jamais vues réellement reconnaitre de « vie privée » qu’il conviendrait de protéger (V. § 12 à 25).
La protection des données personnelles présente également de fortes variations selon le mécanisme analysé (échange de rescrits, de dispositifs transfrontières, de données financières, etc.) ou encore selon les modalités de traitement (c'est-à-dire selon que l’on se penche sur la collecte, l'échange, l'utilisation ou encore la conservation des données) (V. § 26 à 49).
Toujours est-il que l’atteinte que porte nécessairement l’échange automatique d’informations à la protection des données personnelles peut être justifiée si elle a un fondement légal et poursuit un but légitime (ce qui ne fait que peu de doutes) mais également si l’ingérence dans la vie privée est effectivement proportionnée à ce but : c’est certainement sur ce dernier point que la critique peut être portée. En l’état, l’équilibre trouvé entre les intérêts des États et les droits des individus semble particulièrement précaire (V. § 50 à 54).
En second lieu, l’échange automatique d’informations ne pose pas uniquement la question de l’atteinte à la vie privée, mais plus largement celle des préjudices qui peuvent découler d’un échange d’informations éventuellement erronées, incomplètes ou ayant une valeur commerciale. Un certain nombre d’auteurs et de rapports ont ainsi démontré que les systèmes de collecte et de partage de données existants présentaient d’importantes imperfections, auxquelles s’ajoutent les erreurs humaines qui peuvent intervenir dans ces processus complexes et ainsi porter préjudice aux contribuables, tant sur le plan financier que réputationnel (V. § 57 à 65).
En outre, l’échange automatique d’informations génère nécessairement un risque de préjudice commercial lorsque les données échangées sont sensibles. Cela étant, on ne trouvera pas nécessairement dans les développements de la doctrine sur le « secret des affaires » un terrain véritablement fécond de protection des contribuables, notamment dans un contexte où, en réalité, ces derniers bénéficient déjà de protections que l’on trouve au sein des mécanismes existants (V. § 66 à 77).