Virginie RESTINO
Avocat associée, Hoche Société d’Avocats
Avocat associée, Hoche Société d’Avocats
#Mots-clés: Entreprise liée, Avances en compte courant, Intérêts, Ancien dispositif « anti-hybrides » de l’article 212, I, b du CGI, Société prêteuse établie en Suisse, Taux d'imposition en Suisse au moins égal au quart de l’IS (non)
#Article du CGI/LPF: 212
#Convention fiscale: Suisse (1966)
#Pays: Suisse
L’arrêt de la CAA de Toulouse porte sur une application originale du b) du I de l’article 212 du CGI (ancien dispositif « anti-hybrides »).
En l’espèce, la société requérante, holding détenue à 100 % par une société de droit suisse, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité à l’issue de laquelle l’administration a réintégré dans ses résultats, en se fondant sur le b) du I de l’article 212 du CGI, les charges correspondant aux intérêts versés à la société suisse en rémunération des avances en compte courant qu’elle lui avait consenties, aux motifs que ces intérêts n’étaient pas déductibles des résultats dès lors qu’ils n’avaient pas donné lieu, chez la société suisse prêteuse, à une imposition minimale sur les bénéfices représentant au moins le quart de l’impôt sur les sociétés français déterminé dans les conditions de droit commun.
La question était donc de déterminer si le taux d’imposition applicable à la société prêteuse en Suisse était au moins égal au quart de l’impôt sur les sociétés français et pour cela s’il fallait prendre en compte le taux légal prévu par la loi suisse, qui était supérieur au quart de l’IS, ou bien le taux effectif, après neutralisation de la déduction de l’impôt fédéral suisse pour la détermination de la base imposable, qui était inférieur.
La CAA retient le taux effectif d’imposition pour procéder à la comparaison.
Elle rappelle qu’aux termes de l’article 68 de la loi fédérale suisse sur l’impôt fédéral direct, l'impôt sur le bénéfice des sociétés de capitaux et des sociétés coopératives est de 8,5 % du bénéfice net. Toutefois, l'article 59 de la même loi précise que les impôts fédéraux, cantonaux et communaux sont compris dans les charges justifiées par l’usage commercial. Il en résulte que le taux de 8,5 % constitue un taux appliqué au montant du résultat déterminé après impôt et que la société prêteuse a été assujettie à raison des intérêts versés à un taux d’imposition effectif de 7,83 %. Dès lors que ce taux est inférieur au quart du taux de droit commun français, la CAA juge que c’est à bon droit que l’administration fiscale a estimé que la condition prévue au b) du I. de l’article 212 du CGI n’était pas remplie et a en conséquence refusé la déduction des intérêts en cause sur le fondement de la loi fiscale.
Se posait également la question de savoir si la doctrine administrative invoquée par la requérante (BOI-IS-BASE-35-50, 15 avr. 2014) devait être lue au sens que ses termes ont en droit français ou au sens qu’ils ont en droit suisse. La CAA considère que les termes employés et notamment la référence aux « charges de toute nature qui viennent par ailleurs diminuer le résultat imposable de la créancière » doivent être entendus au sens que leur donne la loi fiscale française et non pas celui que leur donne la loi fiscale suisse.
La CAA de Toulouse, conformément aux conclusions du rapporteur public, annule le jugement attaqué et rejette la demande de la société.
#Auteur: Virginie¤ RESTINO
#Qualités: Avocat associée, Hoche Société d’Avocats
Le niveau d’intensité normative des directives, c’est-à-dire la mesure dans laquelle elles prédéterminent les normes qui en assurent la transposition en droit interne, n’est pas sans conséquence sur les modalités de contrôle de celles-ci.
En témoigne la décision n° 2018-768 DC du 26 juillet 20181 par laquelle le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur une loi de transposition d’une directive d’harmonisation minimale, qui comprenait, d’une part, des dispositions tirant les conséquences nécessaires de dispositions inconditionnelles et précises de la directive et, d’autre part, des dispositions prises dans la marge d’appréciation laissée aux États membres par cette directive. Le Conseil a exercé un contrôle ordinaire sur les secondes, par contraste avec le contrôle singulier opéré sur les premières, commandé par l’exigence constitutionnelle de transposition des directives.
À la lumière de cette décision, cet article présente les particularités du contrôle de constitutionnalité des lois de transposition des directives. D’une part, l’exigence constitutionnelle de transposition des directives implique que le Conseil contrôle – uniquement a priori – la compatibilité de la loi avec les dispositions impératives de la directive qu’elle transpose (V. § 2) ; d’autre part, sauf exception, il ne contrôle pas la conformité de la loi aux autres exigences constitutionnelles (V. § 6). Ce contrôle singulier ne s’exerce, toutefois, que sur les dispositions législatives tirant les conséquences nécessaires de dispositions inconditionnelles et précises d’une directive. Les dispositions législatives transposant les dispositions d’une directive qui n’ont pas cette intensité normative font quant à elles l’objet d’un contrôle ordinaire (V. § 17).