Louis TAUDIN
Docteur en droit
Diplômé supérieur de notariat, certifié d'aptitude à la profession d'avocat
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Docteur en droit
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Secret professionnel du notaire - Informations de nature successorale - Communication à des tiers - Principe du contradictoire - Au visa des articles 23 de la loi du 25 ventôse an XI et 1436 du code de procédure civile, la Cour de cassation juge qu'un notaire, pour pouvoir délivrer expédition ou donner connaissance des actes qu'il a établis à des tiers (le liquidateur judiciaire d'une société en l'espèce), doit impérativement être entendu par le président du tribunal judiciaire qui délivre l'ordonnance l'autorisant à déroger au secret professionnel auquel il est en principe tenu.
Cass. civ. 2e, 12 sept. 2024, n° 22-14.609, F-B (V. annexe 1)
Libéralités - Intention libérale - Donation indirecte - Bail d'habitation avec un loyer minoré - Un de cujus, usufruitier d'un immeuble, avait consenti à l'un de ses enfants, pendant douze ans, un bail d'habitation à un prix inférieur à celui du marché. Un conflit s'éleva après l'ouverture de la succession au sujet du rapport successoral de l'avantage qu'a constitué, pour l'enfant, le bénéfice de ces conditions de logement avantageuses. Les juges d'appel retinrent l'existence d'une libéralité rapportable résultant de l'appauvrissement du de cujus (gain manqué résultant de l'absence d'encaissement de loyers normaux). Leur arrêt est censuré par la Cour de cassation dès lors que l'intention libérale du de cujus envers son enfant, nécessaire à l'existence de la libéralité, n'a pas été valablement caractérisée car seulement déduite de l'appauvrissement du gratifiant.
Cass. civ. 1re, 12 juin 2024, n° 22-19.569, F-D (V. annexe 2)
Succession - Saisine des héritiers - Poursuite d'un héritier par un créancier - La Cour de cassation rappelle que l'héritier désigné par la loi, saisi de plein droit des biens, droits et actions du défunt, peut être poursuivi par les créanciers de la succession (en l'espèce l'URSSAF), sauf à lui à renoncer à celle-ci ou à démontrer qu'il est primé par des héritiers plus proches ou qu'il est exclu par un légataire universel ou encore, que la dette doit être divisée entre les héritiers au prorata de leurs droits respectifs.
Cass. civ. 1re, 12 juin 2024, n° 22-16.817, F-D (V. annexe 3)
Succession - Liquidation - Partage d'une multiplicité d'indivisions - Effet déclaratif du partage - Cession d'une quote-part de l'universalité d'une indivision - Acquisition de la qualité d'indivisaire - La Cour de cassation juge qu'il se déduit de l'article 883 du code civil que l'effet déclaratif du partage est sans incidence sur l'efficacité de la cession d'une quote-part de l'universalité d'une indivision, de sorte que le cessionnaire acquiert, par le seul effet de la cession, la qualité d'indivisaire. Il résulte de l'article 840-1 du même code, qu'il ne peut être procédé au partage unique de plusieurs indivisions que si celles-ci existent entre les mêmes personnes. En conséquence, viole ces textes la cour d'appel qui, pour ordonner le partage, entre les trois fondateurs de sociétés civiles immobilières, des parts sociales indivises de celles-ci et dire qu'il conviendra de procéder à un partage unique de ces parts avec d'autres biens indivis entre eux, retient que le sort des donations qu'ils ont faites à leurs propres enfants, dans des proportions variables, de leurs quotes-parts indivises des parts de tout ou partie des SCI, dépendra du sort du partage à intervenir entre eux trois.
Cass. civ. 1re, 3 juill. 2024, n° 22-13.639, F-B (V. annexe 4)
Droits de mutation à titre gratuit (DMTG) - Liquidation - Estimation des biens - La Cour de cassation rappelle qu'une vente postérieure au dépôt d'une déclaration de succession ne peut pas être utilisée pour valoriser un immeuble pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit.
Cass. civ. 1re, 19 juin 2024, n° 22-24.169, F-D (V. annexe 5)
Testament - L egs d'un bien indivis - L egs de la chose d'autrui (non) - Un individu, veuf, procéda par testament olographe au legs particulier d'immeubles indivis entre ses enfants et lui. Après son décès, le légataire demanda la délivrance de son legs, mais il lui fut opposé la nullité de la libéralité à cause de mort comme portant sur la chose d'autrui. Les juges d'appel prononcèrent la nullité du testament sur le fondement de l'article 1021 du code civil en jugeant que le testateur n'avait pas le pouvoir de disposer seul, par testament, d'un bien détenu en indivision. La Cour de cassation censure l'arrêt en soulignant que la chose indivise n'est pas la chose d'autrui. Il est en effet de jurisprudence constante qu'un tel legs est valable à concurrence des droits du testateur dans le bien légué.
Cass. civ. 1re, 6 mars 2024, n° 22-13.766, F-D (V. annexe 1)
Testament - Testament olographe - Condition s de v alidité - Date - É léments de preuve pris en considération - É léments intrinsèques corroborés par des éléments extrinsèques - Mention d'une partie de la date par le testateur - La Cour de cassation juge que selon l'article 970 du code civil, le testament olographe qui n'est pas daté de la main du testateur n'est pas valable. Toutefois, lorsqu'un testament olographe comporte une date dont un ou plusieurs éléments nécessaires pour la constituer ont été portés par un tiers, la nullité de celui-ci n'est pas encourue dès lors que des éléments intrinsèques à l'acte, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée et qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période, le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible. La mention d'une partie de la date figurant sur le testament, écrite de la main du testateur, peut constituer un élément intrinsèque à l'acte.
Cass. civ. 1re, 23 mai 2024, n° 22-17.127, FS-B (V. annexe 2)
Libéralité - Notion - Existence d'une intention libérale - P aiement pour autrui entre époux - Une épouse consentit un prêt à une personne étrangère au couple et ce prêt fut en partie financé par son époux qui émit deux chèques de 10 K€ directement en faveur de l'emprunteur. Un contentieux s'éleva à la suite du décès de l'époux car il fut demandé à la veuve de rapporter à la succession cette somme de 20 K€ qui correspondrait à une donation indirecte entre époux. Les juges d'appel retinrent la qualification de libéralité sur le seul fondement des mouvements de valeurs ci-avant détaillés. La Cour de cassation censure logiquement leur décision en soulignant l'absence de caractérisation d'une intention libérale de l'époux en faveur de son épouse.
Cass. civ. 1re, 6 mars 2024, n° 22-14.745, F-D (V. annexe 3)
Donation-partage - Clause d'inaliénabilité du bien donné (C. civ., art. 900-1) - Justification par le droit de retour légal des donateurs - Autorisation judiciaire d'aliéner - La Cour d'appel de Lyon valide une clause d'inaliénabilité stipulée dans un acte de donation-partage afin de permettre le droit de retour légal des donateurs, mais estime qu'un intérêt supérieur commande que la vente soit autorisée judiciairement. D'une part, la clause d'inaliénabilité avait, au moment du litige, moins d'intérêt pour les donateurs et d'autre part la vente du bien permettait d'assurer la pérennité de l'activité agricole du donataire.
CA Lyon, 1re ch. civ. B, 5 mars 2024, n° 21/08470 (V. annexe 4)
Succession - Liquidation - Rapport des libéralités - Valeur rapportable - Date d'appréciation de l'état du bien donné - Un de cujus avait reçu une parcelle de terrain via donation-partage. Ladite parcelle avait ensuite fait l'objet d'une division avant que l'une des parcelles issues de cette opération soit donnée à l'un de ses héritiers. À l'occasion du partage de la succession du de cujus, l'héritier donataire a dû rapporter la valeur de la parcelle reçue par lui. Il fait grief aux juges d'appel d'avoir fixé cette valeur en fonction de l'état du bien reçu non pas à la date de la donation, mais à celle de la donation-partage de la parcelle initiale en faveur du de cujus. La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel qui contrevient au principe figurant à l'article 860, alinéa 1er du code civil.
Cass. civ. 1re, 2 mai 2024, n° 22-14.140, F-D (V. annexe 5)
Succession - Liquidation - Partage judiciaire - Points de désaccord subsistants - Absence de projet d'état liquidatif dressé par le notaire - Recevabilité des demandes - La Cour de cassation juge qu'il résulte des articles 1373 et 1374 du code de procédure civile qu'en matière de partage judiciaire, seules les demandes distinctes de celles portant sur les points de désaccord subsistant entre les copartageants sur le projet d'état liquidatif dressé par le notaire, dont le juge commis a fait rapport au tribunal, et dont le fondement n'est pas né ou révélé postérieurement à ce rapport, sont irrecevables. Ayant relevé que le notaire désigné pour procéder aux opérations de comptes, liquidation et partage avait transmis un procès-verbal de difficultés au juge commis, qui avait convoqué les parties à une audience de conciliation puis dressé un procès-verbal de non-conciliation, une cour d'appel écarte à bon droit le moyen tiré de l'irrecevabilité d'une demande sur le fondement des textes susvisés, faute de projet d'état liquidatif dressé par le notaire.
Cass. civ. 1re, 6 mars 2024, n° 22-15.311, F-B (V. annexe 6)
Succession - Liquidation - Partage judiciaire - Saisine du juge - Exigence d'un descriptif sommaire du patrimoine à partager - Diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable - La Cour d'appel de Bordeaux refuse l'exigence, s'agissant du descriptif sommaire du patrimoine à partager, de la mention des origines de propriété des biens et de leur appartenance à l'une ou l'autre des successions confondues des deux parents. La Cour de cassation se montre vigilante quant à l'appréciation des diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable.
CA Bordeaux, 3e ch. fam., 7 mai 2024, n° 23/04815 (V. annexe 7)
Droits de mutation à titre gratuit (DMTG) - Prescription de l'action de l'administration - Point de départ - Dépôt de l'acte et paiement des droits (oui) - Enregistrement effectif (non) - La Cour de cassation juge que, dans l'hypothèse où les droits ont été payés au jour du dépôt et où la formalité de l'enregistrement a été acceptée par le comptable, l'acte ou la déclaration soumise à droits de mutation à titre gratuit doit être réputé enregistrés à la date de son dépôt, et non à celle de son enregistrement effectif, afin de ne pas faire subir au contribuable un allongement du délai de reprise pour une cause qui ne lui serait pas imputable.
Cass. com., 10 mai 2024, n° 22-18.929, FS-B (V. annexe 9)
Droits de mutation à titre gratuit (DMTG) - Paiement différé - DMTG afférents à des droits en nue-propriété - O ption pour la dispense de paiement des intérêts contre une imposition à terme sur l'assiette en propriété (CGI, ann. III , art. 404 B ) - I rrévocab ilité - La Cour de cassation juge que l'option offerte au contribuable entre le paiement différé des droits, assis sur la valeur imposable, au jour de l'ouverture de la succession, de la nue-propriété des biens recueillis, avec versement d'intérêts annuels, et le paiement différé des droits, assis sur la valeur imposable de la propriété entière de ces biens, avec dispense d'intérêts, qui ne constitue pas un avantage fiscal offert au contribuable mais une option pour le paiement d'une imposition, implique un choix irrévocable de ce contribuable.
Cass. com., 13 mars 2024, n° 22-16.190, F-B (V. annexe 10)
Testament - Révocation - Testaments successifs - Un contentieux successoral prit racine dans une succession de testaments pris par un de cujus. Une personne, désignée légataire universel par un premier testament datant de 1971, révoqué par un second testament datant de 1974 (désignant un autre légataire universel), lui-même révoqué par un troisième testament de 1982, fit valoir en justice la validité du legs qui lui avait été consenti en 1971, implicitement restauré, selon elle, depuis 1982. La Cour de cassation confirme la position des juges d'appel l'ayant débouté de ses demandes après avoir souverainement interprété les termes imprécis du testament de 1982 comme n'ayant pas rétabli le legs de 1971.
Cass. civ. 1re, 17 janv. 2024, n° 22-12.349, F-D (V. annexe 1)
Testament - Nullité - Appréciation de l'insanité d'esprit du testateur - Exemple - La validité d'un testament rédigé par un de cujus en faveur de son auxiliaire de vie fut contestée par sa fille unique sur le fondement de l'insanité d'esprit. Ses prétentions furent accueillies par les juges d'appel à raison des circonstances suivantes entourant la rédaction du testament : l'existence de « brouillons » manuscrits rédigés peu de temps avant le testament par une autre personne que le testateur ; le recopiage d'un mandat de vente par le testateur avec des erreurs, notamment sur le prix du bouquet au profit de l'auxiliaire de vie ; un certificat médical postérieur de plus d'un an à la rédaction du testament mentionnant la découverte d'un accident vasculaire cérébral passé inaperçu ; une répétition de prénoms et l'absence d'un « madame » dans le testament litigieux. La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel en jugeant ces circonstances impropres à caractériser l'état d'insanité d'esprit du testateur.
Cass. civ. 1re, 7 févr. 2024, n° 22-12.115, F-D (V. annexe 2)
Succession - Liquidation - R éserve héréditaire - Action en réduction - Articulation des d élais de prescription - L'article 921, alinéa 2 du code civil prévoit que le délai de prescription de l'action en réduction de libéralité pour dépassement de la réserve héréditaire « est fixé à cinq ans à compter de l'ouverture de la succession, ou à deux ans à compter du jour où les héritiers ont eu connaissance de l'atteinte portée à leur réserve, sans jamais pouvoir excéder dix ans à compter du décès ». La Cour de cassation précise que le délai de 2 ans à compter de la connaissance de l'atteinte à la réserve ne s'applique pas tant que court le délai initial de 5 ans à compter de l'ouverture de la succession.
Cass. civ. 1re, 7 févr. 2024, n° 22-13.665, FS-B (V. annexe 3)
Succession - Liquidation - Acceptation du patrimoine successoral à concurrence de l'actif net - Inventaire - La Cour de cassation apporte certaines précisions sur l'inventaire qui doit être réalisé pour déterminer la consistance du patrimoine successoral en cas d'acceptation du patrimoine successoral à concurrence de l'actif net par un héritier, dans une espèce où un mineur représenté avait volontairement et de mauvaise foi omis de mentionner un bien dans l'inventaire des actifs mobiliers.
Cass. civ. 1re, 17 janv. 2024, n° 22-12.480, F-D (V. annexe 4)
Succession - Liquidation - Rapport des libéralités - R ègle de subrogation liquidative - Constitution - La Cour de cassation refuse de transmettre au Conseil constitutionnel une QPC relative à la règle prévue par l'article 860, alinéa 2 du code civil selon laquelle, en cas de donation consentie à un héritier présomptif, si un nouveau bien a été subrogé par celui-ci au bien donné, le rapport successoral tient compte de la valeur de ce nouveau bien à l'époque du partage d'après son état à l'époque de l'acquisition. La Cour ne voit pas d'atteinte injustifiée au droit de propriété garanti par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, estimant notamment que le mécanisme subrogatif prévu en matière de rapport successoral des libéralités, qui a pour finalité d'assurer le respect des vocations successorales légales de l'ensemble des héritiers, est justifié par un motif d'intérêt général. Elle souligne en outre qu'il peut être dérogé à ce mécanisme qui n'est pas d'ordre public.
Cass. civ. 1re, 14 févr. 2024, n° 23-19.059, FS-P (V. annexe 5)
Succession - Liquidation - D roits successoraux du conjoint survivant - I mputation des libéralités en usufruit sur le quart en propriété - C onversion - À l'occasion d'un contentieux relatif à la responsabilité civile professionnelle d'un notaire, la Cour de cassation précise la manière dont il y a lieu d'imputer (au titre de l'article 758-6 du code civil) le legs reçu en usufruit par un conjoint survivant sur son quart en propriété des biens existants de la succession qui constitue ses droits légaux d'héritier. Elle juge que la libéralité en usufruit reçue par le conjoint survivant doit être convertie en capital afin d'être comparée à la valeur du quart en propriété. L'imputation de la libéralité en usufruit sur les droits légaux du conjoint survivant se distingue donc nettement de l'imputation en assiette des libéralités en démembrement de propriété récemment consacrée par la Cour de cassation au titre de la liquidation de la réserve héréditaire8.
Cass. civ. 1re, 17 janv. 2024, n° 21-20.520, F-B (V. annexe 6)
Succession - Succession internationale - Droit de prélèvement (loi du 14 juillet 1819, art. 2) - Convention EDH - La CEDH juge qu'il n'y a pas eu violation de la Convention EDH par les juridictions internes françaises qui ont exclu l'application du droit de prélèvement prévu à l'article 2 de la loi du 14 juillet 1819 dans une instance en cours introduite par les enfants d'un défunt, du fait que ledit prélèvement a été déclaré inconstitutionnel entre le décès et la clôture de l'instance.
CEDH, 5e sect., 15 févr. 2024, n° 14157/18, Jarre c/ France (IP 2-2024, n° 7, § 28)
Succession - Liquidation - Masse partageable - La Cour de cassation rappelle que les biens dont le de cujus a disposé à cause de mort sont en principe exclus de la masse à partager.
Cass. civ. 1re, 17 janv. 2024, n° 21-23.720, F-D (V. annexe 7)
Droits de mutation à titre gratuit (DMTG) - Succession dévolue au conjoint en usufruit - Déduction du p assif successoral - Limitation à l'assiette des droits des nus-propriétaires - Un de cujus laissa pour lui succéder son épouse, qui opta pour sa vocation successorale de 100 % en usufruit et son fils unique, héritier en nue-propriété. La déclaration de succession prévoyait l'imputation de la totalité du passif successoral sur la part du nu-propriétaire. L'administration procéda au redressement de l'héritier en imputant ce passif sur l'actif brut successoral. À partir d'une analyse fondée sur les articles 605 et suivants du code civil, la Cour d'appel de Dijon estime que l'héritier en usufruit, qui n'était pas tenu au paiement du passif successoral, ne pouvait voir sa part affectée par celui-ci. Elle donne donc raison au contribuable, héritier en nue-propriété, qui a valablement pu imputer l'intégralité de ce passif sur son assiette taxable aux droits de succession.
CA Dijon, civ. 1re , 5 sept. 2023, n° 21/00745 (V. annexe 8)
Droits de mutation à titre gratuit (DMTG) - Droits de succession - Assurance vie - C ontrat s alimentés par des primes versées après les 70 ans de l'assuré -Accès des notaires au FICOVIE - Les difficultés qu'éprouvent les notaires en charge du règlement de la succession de bénéficiaires de contrat d'assurance vie alimentés par des primes versées après les 70 ans de l'assuré ont été rapportées au ministre de l'économie et des finances. En effet, le secret professionnel auquel sont tenues les compagnies d'assurance et la nature des informations accessibles sur le fichier FICOVIE peuvent rendre hasardeuse la répartition de l'abattement global de 30.500 € entre les différents bénéficiaires des contrats dénoués. Pour autant, le ministre, insistant sur les possibilités de déclaration et de paiement de la fiscalité liée au dénouement du contrat hors l'intervention du notaire et sur la possibilité de déposer une déclaration rectificative ne considère pas qu'il existe ici de difficulté à résoudre. Dès lors, il n'est pas prévu d'étendre l'accès au FICOVIE aux notaires au-delà du cadre actuel.
RM Habib, n° 11247 : JOAN 9 janv. 2024, p. 215 (V. annexe 9)
Droits de mutation à titre gratuit (DMTG) - Paiement fractionné ou différé - Délai d'instruction des demandes de fourniture des garanties - Taux d'intérêt - Un décret modifie sur plusieurs points, à compter du 1er février 2024, le régime du paiement fractionné ou différé des droits d'enregistrement et de la taxe de publicité foncière. Il raccourcit notamment à 2 mois le délai (auparavant 4 mois) dont dispose l'administration pour statuer sur la demande de crédit du contribuable et allonge à 2 mois (auparavant 1 mois) celui dont dispose le contribuable pour fournir un complément de garantie après octroi du crédit. Par ailleurs, les taux d'intérêt sont relevés pour les demandes de crédit formulées à partir du 1er janvier 2024.
D. n° 2023-1324, 28 déc. 2023 : JO 30 déc. 2023, texte n° 6 (V. annexe 10)
Testament olographe - Validité - Conditions - Date - Preuve - É léments intrinsèques corroborés par des éléments extrinsèques - La Cour de cassation juge qu'en dépit de son absence de date, un testament olographe n'encourt pas la nullité dès lors que des éléments intrinsèques à l'acte, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée et qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période, le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible. Une date pré-imprimée sur le support utilisé par le testateur pour rédiger son testament olographe peut constituer un élément intrinsèque à celui-ci.
Cass. civ. 1re, 22 nov. 2023, n° 21-17.524, F-B (V. annexe 1)
Libéralités - Donation - Donation entre époux - Clause de non-divorce - La Cour d'appel de Toulouse valide la révocation d'une donation entre époux en application d'une clause de non-divorce, malgré une lettre d'adieux du donateur à son épouse.
CA Toulouse, 1re ch. - sect. 2, 27 nov. 2023, n° 21/00476 (V. annexe 2)
Testament-partage - Existence - La CA de Riom refuse de reconnaître l'existence d'un testament-partage dans une hypothèse où le testateur avait utilisé la formule « j'entends léguer » et où elle estime qu'il n'existait pas en fait de partage.
CA Riom, civ. 1re, 7 nov. 2023, n° 22/00175 (V. annexe 3)
Succession - Liquidation - Partage judiciaire - Complexité des opérations - Désignation d'un notaire - Commission d'un juge - La Cour de cassation juge qu'il résulte de l'article 1364, alinéa 1er du code de procédure civile que lorsque la complexité des opérations justifie la désignation d'un notaire pour procéder aux opérations de partage prévues aux articles 1364 à 1376 de ce code, le tribunal doit également commettre un juge pour surveiller ces opérations.
Cass. civ. 1re, 22 nov. 2023, n° 21-25.833, F-B (V. annexe 4)
Succession - Liquidation - A ction en réduction des libéralités contre le tiers acquéreur d'un immeuble (C. civ., art. 924-4) - Eu égard aux conclusions du rapport sur la réserve héréditaire rendu le 13 décembre 201912, M. le garde des sceaux, ministre de la justice considère que le dispositif actuel d'action en réduction des libéralités contre le tiers acquéreur d'un immeuble (C. civ., art. 924-4) réalise un bon compromis entre la sécurité des transactions et le respect de la réserve héréditaire. Il n'est donc pas envisagé de le modifier.
RM Falorni, n° 8707 : JOAN 26 sept. 2023, p. 8543 (V. annexe 5)
Succession - Liquidation - Parts sociales - Agrément des associés - Droit de vote en cas d'indivision - La chambre commerciale de la Cour de cassation se prononce sur la qualité d'associés des héritiers d'un associé de GFA décédé, ce qui nécessitait d'examiner l'existence éventuelle de clauses d'agrément et de se prononcer sur l'exercice du droit de vote en l'absence de partage des parts sociales qui restaient donc indivises.
Cass. com., 30 août 2023, n° 22-10.018, Sté GFA domaine de la Trésorière et a., F-D (V. annexe 6)
Droits de mutation à titre gratuit (DMTG) - Droits de succession - Déclaration et paiement - Demandes gracieuses - Le rapport annuel 2022 du Comité du contentieux fiscal, douanier et des changes, adopté par le comité dans ses séances du 12 juin 2023, est publié au Journal officiel. Il comporte notamment, en matière de fiscalité patrimoniale, des développements concernant le traitement des demandes gracieuses en matière de droits de succession (p. 41 à 46 du rapport), avec des propositions de réformes.
Comité du contentieux fiscal, douanier et des changes, Rapport annuel 2022 : JO, éd. Documents administratifs, 25 août 2023
Droits de mutation à titre gratuit (DMTG) - Exonération - Restitutions de biens spoliés lors de la persécution antisémite - La loi de finances pour 2024 instaure une nouvelle exonération de droits de succession applicable aux restitutions de biens spoliés dans le cadre des persécutions antisémites perpétrées entre le 30 janvier 1933 et le 8 mai 1945, intervenant à compter du 22 juillet 2023.
L. n° 2023-1322, 29 déc. 2023 de finances pour 2024, art. 25 : JO 30 déc. 2023, texte n° 1 (V. annexe 7)
Droits de mutation à titre gratuit (DMTG) - Dons manuels et de sommes d'argent, cessions de droits sociaux - Réclamation - La loi de finances pour 2024 permet au service national de l'enregistrement (SNE), qui traite les déclarations en ligne de dons manuels et de sommes d'argent et de cessions de droits sociaux non constatées par un acte, de prendre en charge les réclamations des contribuables portant sur ces déclarations en application de dispositions règlementaires à venir.
L. n° 2023-1322, 29 déc. 2023 de finances pour 2024, art. 118 : JO 30 déc. 2023, texte n° 1 (V. annexe 8)
Testament - Legs particulier - Nécessité de la demande de délivrance - Indifférence de la mise en possession avant le décès - La Cour de cassation juge qu'il résulte de l'article 1014 du code civil que, si le légataire particulier devient, dès l'ouverture de la succession, propriétaire de la chose léguée, il est néanmoins tenu, pour faire reconnaître son droit, de demander la délivrance du legs, peu important qu'il ait été mis en possession de cette chose par le testateur avant son décès.
Cass. civ. 1re, 21 juin 2023, n° 21-20.396, FS-B (V. annexe 1)
Libéralités - Notion - Exigence d'une intention libérale - La Cour de cassation censure des juges d'appel qui avaient considéré qu'un fils avait bénéficié d'une libéralité de son père lors de l'acquisition d'un immeuble, du seul fait que les fonds paternels versés ont servi à financer en partie ce bien, sans établir l'intention libérale du père.
Cass. civ. 1re, 1er juin 2023, n° 21-22.840, F-D (V. annexe 2)
Donation-partage - Définition - Actes séparés - Portée - La Cour de cassation juge qu'il résulte des articles 1075 et 1076, alinéa 2 du code civil que la donation-partage, même faite par actes séparés, suppose nécessairement une répartition de biens effectuée par le disposant lui-même ou, tout au moins, sous sa direction et avec son concours.
Cass. civ. 1re, 12 juill. 2023, n° 21-20.361 et n° 21-23.425, FS-B (V. annexe 3)
Successions internationales - Règlement « successions » - Règle de compétence subsidiaire - La CJUE juge par ordonnance que l'article 10, § 1, a) du règlement successions du 4 juillet 2012 doit être interprété en ce sens que la règle de compétence subsidiaire prévue par cette disposition ne trouve à s'appliquer que lorsque la résidence habituelle du défunt au moment du décès était située dans un État membre non lié par ce règlement ou dans un État tiers.
CJUE, 10e ch., ord., 17 juill. 2023, C-55/23, Jurtukała (V. annexe 4)
Succession - Liquidation - Réduction des libéralités - Bien reçu par donation-partage et vendu par le bénéficiaire - Absence d'appel des cohéritiers réservataires pour renoncer à l'action en réduction en nature - Responsabilité du notaire - La CA de Douai condamne un notaire, sur le fondement de la responsabilité civile, à indemniser les acquéreurs d'un bien ayant fait l'objet d'une donation-partage et vendu par le bénéficiaire de la libéralité sans que ses cohéritiers réservataires n'aient été appelés pour renoncer à l'action en réduction en nature.
CA Douai, 1re ch. - 1re sect., 6 avr. 2023, n° 21/01877 (V. annexe 5)
Droits de mutation à titre gratuit - Biens ruraux et parts de groupements fonciers agricoles (GFA) - L'administration intègre dans ses commentaires, en apportant des précisions utiles, l'extension par la loi de finances pour 2023 de l'exonération de droits de mutation à titre gratuit dont bénéficient, sous condition de conservation, les donataires, légataires ou héritiers de biens ruraux et de parts de groupements fonciers agricoles (GFA).
BOI-ENR-DMTG-10-20-30-20, BOI-ENR-DMTG-10-20-30-30 et BOI-ENR-DMTG-10-50-50, 11 juill. 2023. - BOFiP, actualité, 11 juill. 2023
Droits de mutation à titre gratuit - Monuments historiques - L'administration fiscale met à jour ses commentaires officiels des dernières évolutions réglementaires et jurisprudentielles, relatives aux règles de déduction des charges foncières supportées par les propriétaires d'immeubles labellisés par la Fondation du patrimoine et au modèle de convention type fixant les modalités d'accès au public et les conditions d'entretien des biens.
BOI-ENR-DMTG-10-20-30-60, BOI-ENR-DMTG-10-20-30-70, BOI-SJ-AGR-50-40, BOI-LETTRE-000117, 25 juill. 2023. - BOFiP, actualité, 25 juill. 2023
Présents d'usage - Notion - Nécessité de l'existence d'une occasion et d'un usage particuliers - Dans le cadre d'un partage de succession, la question du rapport successoral et, conséquemment, celle de la caractérisation d'un recel successoral, furent soulevées au sujet de retraits de somme d'argent (de 2 200 € et 1 300 €) effectués sur le compte bancaire du de cujus par son fils, vivant sous le même toit. L'arrêt d'appel est censuré pour avoir caractérisé l'existence de présents d'usage non soumis à rapport successoral eu égard à la seule compatibilité des montants en jeu avec les capacités financières du donateur. La Cour de cassation rappelle en effet la nécessité que les présents d'usage soient en outre rattachés à une occasion et un usage particuliers.
Cass. civ. 1re, 11 mai 2023, n° 21-18.616, F-D (V. annexe 1)
Succession - Liquidation - Indivision successorale - Partage judiciaire - Le ministère de la Justice conduit une réflexion afin de simplifier les procédures de partage judiciaire des indivisions.
RM Belin, n° 00979 : JO Sénat 2 mars 2023, p. 1580 (V. annexe 3)
Succession - Liquidation - Assurance vie - Absence de contrats dans la déclaration de succession - Rectification par l'administration fiscale - Responsabilité du notaire - À la suite d'une proposition de rectification relative à trois contrats d'assurance vie dénoués dont il n'avait pas été tenu compte dans une déclaration de succession, un contribuable mit en jeu la responsabilité civile professionnelle du notaire en charge de la succession. Des juges d'appel condamnèrent la compagnie d'assurance à garantir partiellement le notaire en cause, au motif qu'elle se serait abstenue de porter à sa connaissance l'existence des contrats d'assurance vie souscrits par le de cujus, ni même à la connaissance du bénéficiaire du contrat ou à sa curatrice avant l'expiration du délai de déclaration. La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel en jugeant notamment que l'assureur n'était pas tenu de porter à la connaissance du notaire, qui ne lui en avait pas fait la demande, l'existence des contrats d'assurance sur la vie souscrits par le de cujus.
Cass. civ. 1re, 13 avr. 2023, n° 21-20.272, F-B (V. annexe 4)
Droits de mutation à titre gratuit - Succession - Dons sur succession à des organismes sans but lucratif - La 1re loi de finances rectificative pour 2020 a étendu le régime d'abattement aux droits de successions applicable en cas de dons en nature de biens successoraux consentis par les héritiers à une fondation reconnue d'utilité publique, à ceux consentis en faveur d'une association reconnue d'utilité publique. Le même texte porta par ailleurs le délai imparti aux héritiers pour réaliser de tels dons de 6 à 12 mois à compter du décès. Cette loi instaura enfin, pour les organismes exonérés de droits de mutation à titre gratuit, une dispense de fourniture à l'assureur-vie d'un certificat de non-exigibilité des droits de mutation par décès pour obtenir à leur profit le déblocage des prestations assurées (IP 4-2020, n° 5, § 25). Ces règles sont intégrées aux commentaires de l'administration.
BOI-ENR-DMTG-10-50-20 et BOI-ENR-DMTG-10-70-20, 24 mai 2023. - BOFiP, Actualité, 24 mai 2023
Droits de mutation à titre gratuit - Succession - Sanction du dépôt tardif de déclaration de succession d'un héritier réservataire en présence d'un légataire universel - Conformité à la Constitution - Le dépôt de la déclaration de succession et le paiement des droits doivent, en principe, intervenir dans les 6 mois du décès. Or, dans l'affaire à l'origine du contentieux en cause, des héritiers réservataires exhérédés par un legs universel stipulé en faveur du conjoint survivant ne déposèrent leurs déclaration de succession qu'après avoir signé un protocole transactionnel fixant l'actif net de succession et le montant de leurs indemnités de réduction, plusieurs années après l'ouverture de la succession. Ils contestent l'application de la majoration de 10% pour retard de déclaration en soulevant la question de la conformité à la Constitution de l'exigence légale d'enregistrement de la déclaration de succession dans les 6 mois du décès dans l'hypothèse particulière qui est la leur. En effet, en présence d'un légataire universel par ailleurs héritier, les héritiers réservataires ne disposent pas de la saisine des biens successoraux mais d'un simple droit de créance vis-à-vis du légataire universel, de sorte qu'ils peuvent être tenus d'acquitter un impôt sur des sommes qu'ils pourraient ne pas avoir perçues, et ce, pour des raisons indépendantes de leur volonté. Sur renvoi de la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel juge ces règles conformes à la Constitution. Après avoir souligné que l'héritier réservataire disposait d'une créance certaine à l'égard du légataire universel dès l'ouverture de la succession, il juge que l'obligation déclarative dans les 6 mois malgré le non-paiement de l'indemnité de réduction ne méconnait pas le principe d'égalité devant les charges publiques.
Cass. com., 5 avr. 2023, n° 23-40.001, F-D. - CC, 1er juin 2023, n° 2023-1051 QPC, Mme Catherine R. et a. (V. annexe 5)
Donation - Convention de révocation - Contournement de la réserve héréditaire - Nullité - Un parent donna à l'un de ses enfants une somme d'argent. Ce dernier, marié en régime de communauté, remploya ces sommes dans l'acquisition de titres de sociétés. Une dizaine d'années plus tard, le parent et son enfant révoquèrent la donation de somme d'argent par mutuus dissensus. Un autre enfant contesta la validité de ce contrat de révocation en soutenant que sa cause résidait dans la volonté des parties de faire échapper la donation initiale aux règles d'ordre public de la réunion fictive conduisant à intégrer à la liquidation de la réserve héréditaire la valeur des biens acquis en remploi des sommes reçues par donation. Les juges du fond admirent cependant la validité de la convention de révocation en fondant leur décision sur une distinction critiquable entre la cause du contrat, devant être licite et ses mobiles, indifférents. La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel en jugeant qu'un contrat n'est valable que si les motifs ayant déterminé les parties à contracter sont licites.
Cass. civ. 1re, 30 nov. 2022, n° 21-11.507, FS-B (V. annexe 1)
Donation - Donation déguisée de biens communs consentie conjointement par les époux - Réduction - Déclaration de simulation - Délai pour agir - Des époux mariés en régime de communauté apportèrent conjointement une aide financière à deux de leurs enfants au moyen de valeurs dépendant de leur communauté conjugale. Après le décès du conjoint survivant, le troisième enfant du couple agit en déclaration de simulation en vue de la réduction des donations déguisées consenties par ses parents à ses frères. Les juges d'appel, après avoir considéré que le point de départ du délai de prescription d'une telle action devait être fixé au décès du premier époux, jugèrent l'action prescrite. La Cour de cassation censure l'arrêt en rappelant que, sauf clause contraire, la donation de biens communs est réputée consentie à concurrence de moitié par chacun des époux, de sorte que sa réduction ne peut être demandée par leurs enfants communs qu'à due proportion, à l'ouverture de chacune des successions des codonateurs. Dès lors, le délai de prescription qui concernait la moitié de libéralité consentie par le conjoint survivant ne commença à courir qu'à compter de son décès.
Cass. civ. 1re, 5 janv. 2023, n° 21-13.151, FS-B (V. annexe 2)
Donation - Donation indirecte - Distribution inégalitaire de dividendes - La CA de Paris refuse de voir une donation indirecte dans une résolution d'assemblée générale arrêtée à l'unanimité́ selon laquelle de convention expresse entre les associés, la distribution de dividende prévue par cette résolution est, à titre exceptionnel, intégralement réservée à l'un des deux associés, alors qu'il ne détenait que 43,82 % des parts de la société́.
CA Paris, pôle 5 - ch. 10, 9 janv. 2023, n° 21/04503 (V. annexe 3)
Donation - Usufruit viager déjà constitué sur la tête du donateur - La Cour de cassation rappelle que l'usufruit s'éteint notamment par la mort de l'usufruitier, de sorte qu'en cas de donation d'un usufruit déjà constitué à titre viager, le décès du parent donateur entraîne nécessairement l'extinction de l'usufruit.
Cass. civ. 1re, 5 janv. 2023, n° 21-13.966 (IP 2-2023, n° 3, § 14)
Succession - 1° Prohibition des pactes sur succession future - Modalités de remboursement du compte courant de l'un des associés lors de l'ouverture de sa succession - 2° Prohibition des engagements perpétuels - Pacte d'associés pour la durée de vie de la société - La Cour de cassation : 1° refuse d'annuler un pacte d'associés contenant une clause prévoyant les modalités de remboursement du compte courant de l'un des associés lors de l'ouverture de sa succession , dont il était argué qu'il s'agissait d'un pacte sur succession future ; la Cour estime que cette clause avait seulement été conçu comme une mesure de gestion de la société au décès de cet associé et que, n'étant pas un élément essentiel et déterminant du pacte d'actionnaires, la demande de nullité du pacte en son entier devait être rejetée ; 2° juge que la prohibition des engagements perpétuels n'interdit pas de conclure un pacte d'associés pour la durée de vie de la société, de sorte que les parties ne peuvent y mettre fin unilatéralement.
Cass. civ. 1re, 25 janv. 2023, n° 19-25.478, FS-B (V. annexe 4)
Succession - Liquidation - Rapport successoral - Évaluation de parts de société - Partage amiable - Obligation de conseil du notaire et de l'avocat - La Cour de cassation rejette une action en responsabilité civile professionnelle contre un notaire et un avocat, faute de preuve d'un préjudice. Bien que fautifs de ne pas avoir appliqué les principes posés par l'article 860 du code civil en matière de rapport pour l'évaluation des parts d'une société, la Cour considère que même si l'héritier avait été parfaitement informé de la mise à l'écart de l'article 860, il aurait pris une décision différente et plus avantageuse, à savoir celle qu'il a effectivement prise en signant un partage amiable.
Cass. civ. 1re, 11 janv. 2023, n° 21-18.247, F-D (V. annexe 5)
Droits de mutation à titre gratuit - Don manuel - Révélation lors du premier entretien avec le vérificateur dans le cadre d'un ESFP - Fermeture de l'option pour la déclaration différée - La Cour de cassation juge que la révélation de dons manuels intervenue lors du premier entretien avec le vérificateur dans le cadre d'un examen contradictoire de la situation personnelle ne peut pas être considérée comme spontanée. Par suite, elle ne peut donner lieu à l'option du donataire pour une déclaration des dons dans le délai d'un mois suivant la date du décès du donateur.
Cass. com., 25 janv. 2023, n° 20-16.700, F-B (V. annexe 6)
Droits de mutation à titre gratuit - Paiement différé ou fractionné des droits d'enregistrement et de la TPF - Augmentation du taux d'intérêt - L'administration fiscale informe sur son site internet que pour les demandes de crédit formulées à partir du 1er janvier 2023 au titre du paiement différé ou fractionné des droits de mutation à titre gratuit et de la taxe de publicité foncière, le taux normal est fixé à 1,7 % (au lieu de 1,2 %) et le taux réduit des deux tiers à 0,5 % (au lieu de 0,4 %).
www.impots.gouv.fr, actualité, 12 janv. 2023
Annulation d'un acte pour insanité d'esprit - Titulaires de l'action : héritiers, dont le conjoint survivant - Les actes conclus sous l'empire d'un trouble mental peuvent être annulés par l'intéressé. Après le décès du contractant dont il peut être prouvé l'insanité d'esprit, l'action en nullité n'appartient qu'à ses héritiers. La Cour de cassation juge que le conjoint survivant non divorcé, héritier légal du défunt avec ses parents, est héritier au sens de l'article 414-2 du code civil. Il peut donc agir en nullité des actes conclus par son conjoint décédé, dans les conditions prévues par cet article.
Cass. civ. 3e, 12 oct. 2022, n° 21-15.669, M et Assoc. Croix Marine c/ D, F-D (V. annexe 1)
Libéralités - Testament mystique - Personne souffrant de troubles de la vision - Acte de suscription - Mention de la manière dont le testateur a pu lire son testament - Des juges du fond annulèrent le testament mystique déposé par une personne qui, en raison d'une maladie neurodégénérative altérant son acuité visuelle, n'avait pu lire elle-même le document dactylographié, avec des caractères de taille normale, présenté à son notaire. Les juges du fond annulèrent le testament mystique dont le recours est interdit par la loi aux personnes qui ne savent ou ne peuvent lire. La Cour de cassation confirme l'arrêt d'appel et souligne, comme les juges du fond, l'absence d'élément extrinsèque, dont l'acte de suscription dressé par le notaire, qui viendrait éclairer sur la manière dont le testateur aurait pu lire le document présenté comme étant son testament. Elle ajoute qu'un tel testament, déclaré nul en tant que testament mystique, ne pouvait valoir comme testament international.
Cass. civ. 1re, 12 oct. 2022, n° 21-11.408, FS-B (V. annexe 2)
Succession - Succession internationale - Règlement successions - Compétences juridictionnelles subsidiaires - La Cour de cassation met fin à une difficulté de mise en œuvre du règlement « successions » du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen.
Cass. civ. 1re, 21 sept. 2022, n° 19-15.438 (IP 1-2023, n° 7, § 27)
Succession - Liquidation - Acceptation à concurrence de l'actif net - Publication au BODACC - Effet à l'égard des créanciers de la succession - Déclaration des créances - Créancier titulaire d'un titre exécutoire - Selon l'article 792 du code civil, lorsque la succession a été acceptée par un héritier à concurrence de l'actif net, les créanciers de la succession doivent déclarer leurs créances en notifiant leur titre au domicile élu de la succession. Les créances dont le montant n'est pas encore définitivement fixé sont déclarées à titre provisionnel sur la base d'une évaluation. Faute de déclaration dans un délai de quinze mois à compter de la publicité nationale dont fait l'objet la déclaration d'acceptation de succession, les créances non assorties de sûreté sur les biens de la succession sont éteintes à l'égard de celle-ci. Il résulte des articles 1234, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1342, alinéa 3, du code civil que le paiement éteint la dette. Il se déduit de ces textes que les paiements effectués en vertu d'un jugement exécutoire par provision éteignent les créances correspondantes de sorte qu'elles ne sont pas soumises à l'obligation de déclaration prévue à l'article 792 du code civil.
Cass. civ. 1re, 12 oct. 2022, n° 20-21.016, FS-B (V. annexe 3)
Succession - Liquidation - Rapport civil - Donation avec charge - Méthode d'évaluation - La Cour de cassation confirme l'arrêt par lequel des juges d'appel ont évalué la valeur de rapport à succession d'une donation avec charge en déduisant de la valeur du bien donné à la date du partage celle de la charge associée, évaluée pour sa part au jour de son exécution (et non réévaluée au jour du partage). Il résulte en effet de l'article 860 du code civil que le rapport n'est dû qu'à concurrence de l'émolument net procuré par la libéralité, calculé en déduisant de la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation, le montant de la charge déterminé au jour de son exécution.
Cass. civ. 1re, 16 nov. 2022, n° 21-11.837, FS-B (V. annexe 4)
Succession - Liquidation - Rapport civil - Fermages auxquels le défunt a renoncé dans une intention libérale - Pendant une dizaine d'années, un parent donna à bail divers biens agricoles à l'un de ses enfants et renonça à en recouvrer les fermages. Dans le cadre de la liquidation de sa succession, la prise en compte de cet avantage au titre du rapport successoral souleva une difficulté conduisant les héritiers devant les tribunaux. La Cour d'appel de Paris, après avoir caractérisé l'intention libérale de laquelle procédait cette renonciation à fermages exprimée à une époque où ceux-ci n'étaient pas prescrits, admit leur rapport à la succession. La Cour de cassation confirme la position des juges du fond en rejetant les prétentions de l'enfant gratifié fondées sur une logique de rapport de dettes limité à celles qui n'étaient pas prescrites.
Cass. civ. 1re, 21 sept. 2022, n° 20-22.139, FS-B (V. annexe 5)
Succession - Liquidation - Avance successorale - Dette rapportable - Intérêt - À la suite du décès de leurs grands-parents, des petits-enfants venant à la succession par représentation se virent consentir, par une ordonnance du TGI, une avance successorale fondée sur le 4e alinéa de l'article 815-11 du code civil. Dans le cadre du règlement des successions, une cour d'appel jugea que les avances successorales ne produiront intérêt au taux légal qu'à compter de la date du partage. La Cour de cassation censure l'arrêt des juges du fond en jugeant que l'héritier bénéficiaire de l'avance, qui contracte envers la succession une dette sujette à rapport, doit les intérêts au taux légal à compter, soit de la date d'ouverture de la succession, soit de la date de naissance de la dette si elle lui est postérieure.
Cass. civ. 1re, 12 oct. 2022, n° 21-11.223, F-D (V. annexe 6)
Succession - Liquidation - Réduction des libéralités - Masse de calcul - Masse de tous les biens existant au décès du donateur ou testateur - Au visa de l'article 922, alinéa 1er du code civil, la Cour de cassation casse un arrêt de cour d'appel qui avait jugé qu'il n'était pas nécessaire d'effectuer préalablement à la réduction la liquidation du régime matrimonial du défunt et de l'indivision post-communautaire qui s'en est suivie dans la mesure où un protocole transactionnel avait été signé sur ces questions après l'ouverture de la succession.
Cass. civ. 1re, 21 sept. 2022, n° 20-18.546, F-D (V. annexe 7)
Succession - Liquidation - Partage successoral amiable - Indemnité de réduction incluant des primes d'assurance vie considérées exagérées - Nécessité d'une information spéciale par le notaire - Dans le cadre du règlement d'une succession intervenant dans un contexte de famille recomposée, le conjoint survivant signa un acte de partage amiable de succession mettant à sa charge une importante indemnité de réduction. Cette personne reprocha par la suite un défaut de conseil à son notaire et chercha devant les tribunaux à engager sa responsabilité civile professionnelle. Les juges d'appel rejetèrent ses prétentions en estimant que le conjoint survivant, destinataire de plusieurs courriers et projets d'acte au sein desquels le montant de l'indemnité de réduction varia, avait bénéficié d'un temps de réflexion suffisant entre le dernier de ces courriers et la signature de l'acte de partage. La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel en reprochant aux juges du fond de ne pas avoir constaté que le notaire avait précisément attiré l'attention du conjoint sur la réintégration à la masse successorale d'un montant de primes d'assurance vie (en raison de leur importance eu égard aux facultés du souscripteur).
Cass. civ. 1re, 9 nov. 2022, n° 21-11.810, F-D (V. annexe 8)
Libéralités entre époux - Articulation avec la réserve héréditaire - Réduction - Un conjoint survivant, bénéficiaire d'une donation entre époux, avait également été institué par testament légataire universel et bénéficiait enfin d'un legs particulier. La Cour de cassation censure des juges du fond qui avaient estimé que l'option du conjoint survivant pour l'une des quotités disponibles de l'article 1094-1 du code civil valait réduction des libéralités reçues à l'une des quotités permises par la loi, alors que ce conjoint contestait avoir renoncé à son legs universel.
Cass. civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 21-10.226 (V. annexe 1)
Libéralités - Incapacité à recevoir à titre gratuit - Membres de professions de santé soignant la dernière maladie (C. civ., art. 909) - Conformité à la Constitution - La Cour de cassation a renvoyé, le 24 mai dernier, une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 909 du code civil qui prévoit l'incapacité des membres des professions médicales, de pharmacie et des auxiliaires médicaux de recevoir une libéralité entre vifs ou testamentaire de la part de la personne qu'elles soignent ou ont soigné pour la maladie dont elle décèdera ou dont elle est décédée. Cette interdiction, qui ne peut être écartée par la preuve de l'absence de vulnérabilité ou de dépendance du gratifiant, est jugée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel. En effet, l'atteinte au droit de propriété, qui poursuit un but d'intérêt général (protéger une personne vulnérable d'un risque de captation de ses biens) est également proportionnée à l'objectif poursuivi (encadrement temporel et personnel du dispositif).
CC, 29 juill. 2022, n° 2022-1005 QPC, Marie D. (V. annexe 2)
Libéralités - Donation avec réserve d'usufruit - Logement de la famille - La Cour de cassation réitère la solution résultant de son arrêt du 22 mai 20192 qui avait considéré qu'un conjoint marié peut procéder, seul et sans l'accord de l'autre conjoint, à la donation de la nue-propriété de l'immeuble constituant le logement de la famille en stipulant une réserve d'usufruit à son seul profit. En effet selon elle, une telle opération ne porte aucunement atteinte à la jouissance du logement familial par les époux pendant le mariage.
Cass. civ. 1re, 22 juin 2022, n° 20-20.387 (V. annexe 3)
Libéralités - Testament - Annulation - Prescription de l'action en restitution - La Cour de cassation juge que l'action en restitution consécutive à l'annulation d'un testament se prescrit par cinq ans à compter du jour où l'héritier ou le légataire rétabli dans ses droits a connu ou aurait dû connaître l'appréhension, par le bénéficiaire du testament annulé, des biens revendiqués, sans que le point de départ du délai de prescription puisse être antérieur au prononcé de la nullité.
Cass. civ. 1re, 13 juill. 2022, n° 20-20.738 (V. annexe 4)
Assurance vie - Primes manifestement exagérées - Rapport - La Cour de cassation censure des juges du fond ayant refusé le rapport des primes versées sans avoir recherché si, au regard de l'âge, de la situation familiale de la souscriptrice et de l'utilité du contrat pour celle-ci, les primes versées présentaient un caractère manifestement exagéré eu égard à ses facultés.
Cass. civ. 2e, 16 juin 2022, n° 20-20.544 (V. annexe 5)
Succession - Dévolution - Saisine des héritiers - Actions en justice - Dommage causé par un manquement contractuel - Responsabilité délictuelle - La Cour de cassation juge qu'il résulte de l'article 1165 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et de l'article 1382, devenu 1240, de ce code que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage. Un héritier ne peut agir sur ce fondement en invoquant un manquement contractuel commis envers son auteur qu'en réparation d'un préjudice qui lui est personnel. N'est pas un préjudice personnel subi par l'héritier celui qui aurait pu être effacé, du vivant de son auteur, par une action en indemnisation exercée par ce dernier ou qui peut l'être, après son décès, par une action exercée au profit de la succession en application de l'article 724 du code civil.
Cass. com., 15 juin 2022, n° 19-25.750 (V. annexe 6)
Succession - Liquidation - Réserve héréditaire - Absence d'indivision successorale et de partage - Calcul de l'indemnité de réduction - Valeur des biens transmis à la date la plus proche du paiement de l'indemnité - Une personne décéda en laissant pour lui succéder ses deux fils, dont l'un bénéficiait d'un legs universel. L'autre enfant, à la suite de difficultés survenues lors du règlement de la succession, sollicita la désignation d'un expert chargé de procéder aux évaluations nécessaires à la détermination de l'indemnité de réduction due par son frère. Les juges du fond rejetèrent sa demande de valorisation par l'expert des biens légués à la date la plus proche du paiement de l'indemnité de réduction. Ils jugèrent en effet qu'en l'absence d'indivision et donc de partage, le légataire universel détient la propriété des biens légués à la date du décès, qui est celle de la jouissance divise, de sorte que c'est à cette date que l'indemnité de réduction serait due au réservataire et devrait donc être liquidée. L'arrêt est censuré par la Cour de cassation au visa de l'article 924-2 du code civil. Pour les juges du droit, en l'absence d'indivision entre le bénéficiaire de la libéralité et l'héritier réservataire et, par conséquent, en l'absence de partage, le montant de l'indemnité de réduction se calcule d'après la valeur des biens donnés ou légués à l'époque de sa liquidation ou de leur aliénation par le gratifié. Jugeant l'affaire au fond, ils décident que l'expert désigné aura pour mission de déterminer la valeur des biens donnés ou légués à la date la plus proche du paiement de l'indemnité de réduction.
Cass. civ. 1re, 22 juin 2022, n° 21-10.570 (V. annexe 7)
Succession - Liquidation - Réserve héréditaire - Réduction des libéralités en usufruit - Imputation en assiette - Un de cujus laissant pour héritier sa fille unique, avait légué à sa compagne (qui n'était pas la mère de son enfant) l'usufruit d'une maison d'habitation dont la valeur (en propriété) représentait plus de la moitié de la masse de calcul de la réserve héréditaire. L'enfant avait demandé en justice la réduction du legs en usufruit, mais sa demande fut rejetée par les juges du fond qui, dans le cadre de l'imputation du legs sur la quotité disponible, retinrent la méthode de l'imputation en valeur conduisant à n'imputer que la seule valeur de l'usufruit (soit en l'espèce 60 % de la valeur de la propriété). La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel et juge que l'atteinte à la réserve héréditaire doit s'apprécier en imputant le legs en usufruit sur la quotité disponible, non après conversion en valeur pleine propriété, mais en assiette.
Cass. civ. 1re, 22 juin 2022, n° 20-23.215 (V. annexe 8)
Succession - Liquidation - Partage judiciaire - Remplacement du notaire commis - Désignation par le tribunal ou le juge commis - La Cour de cassation juge qu'il résulte de la combinaison des articles 1364 et 1371, alinéa 2 du code de procédure civile que, si les copartageants peuvent choisir d'un commun accord le remplaçant du notaire initialement désigné, celui-ci ne peut poursuivre les opérations de partage sans être désigné par le tribunal ou le juge commis.
Cass. civ. 1re, 22 juin 2022, n° 20-22.712 (V. annexe 9)
Succession - Liquidation - Partage - Demande relative à l'établissement de l'actif et du passif - Recevabilité - La Cour de cassation juge qu'aux termes de l'article 910-4, alinéa 1er du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures. En application de l'alinéa 2 de ce texte, l'irrecevabilité prévue par l'alinéa 1er ne s'applique pas aux prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses. Tel est le cas en matière de partage où, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l'établissement de l'actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse.
Cass. civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-20.688 (V. annexe 10)
Libéralités - Incapacité à recevoir à titre gratuit - Auxiliaires de vie à domicile - Testament authentique antérieur à l'entrée en vigueur de la loi du 28 décembre 2015 - La loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 a notamment instauré une incapacité de recevoir à titre gratuit des auxiliaires de vie à domicile, censurée depuis par le Conseil constitutionnel. Une personne décédée en 2016 avait consenti un legs à titre particulier à son auxiliaire de vie à domicile au sein d'un testament authentique de 2013 et de son codicille de 2014. Les juges d'appel prononcèrent l'annulation du legs conformément à l'article L. 116-4 du code de l'action sociale et des familles. La Cour de cassation censure l'arrêt en jugeant que ledit article, entré en vigueur postérieurement à la date du testament, ne lui était pas applicable.
Cass. civ. 1re, 23 mars 2022, n° 20-17.663 (V. annexe 1)
Libéralités - Don manuel - Exemple de dispense tacite de rapport successoral - Les donations simples ou dons manuels consentis à des héritiers présomptifs sont, en principe, rapportables dans le cadre du partage de la succession du donateur, sauf dispense de rapport. Cette dispense peut être expresse mais également tacite et résulter d'une recherche de la volonté du donateur. La Cour de cassation confirme l'arrêt d'appel ayant caractérisé la dispense tacite de rapport à partir du contexte dans lequel sont intervenus une série de dons en faveur de ses enfants : des dons concomitants faisant suite au décès du conjoint du donateur, l'emploi des capitaux tout juste reçus par le donateur en tant que bénéficiaire d'un contrat d'assurance vie souscrit par son conjoint, le souhait exprimé dans une lettre manuscrite de répartir ces fonds entre ses enfants, etc.
Cass. civ. 1re, 23 mars 2022, n° 20-17.633 (V. annexe 2)
Libéralités - Mise à disposition gratuite d'un immeuble par un parent usufruitier à un enfant nu-propriétaire - Réalisation de travaux par le nu-propriétaire - Caractérisation de l'acte gratuit - Rapport successoral - Un immeuble appartenait en usufruit à une mère et en nue-propriété indivisément à ses deux fils. Pendant de nombreuses années, l'immeuble fut gratuitement mis à disposition de l'un des enfants qui finança cependant divers travaux d'entretien ou de grosses réparations portant sur le bien. Des difficultés surgirent lors du partage de la succession de la mère, quant au rapport successoral de l'avantage dont avait bénéficié l'un de ses fils. La Cour de cassation confirme en premier lieu l'arrêt d'appel en ce qu'il a jugé que le fils devait rapporter à la succession l'avantage consistant dans le montant des loyers non réglés, déduction faite des seules réparations et frais d'entretien incombant normalement à l'usufruitière (et non les grosses réparations imputées aux nus-propriétaires). Les juges du droit censurent cependant l'arrêt des juges du fond sur plusieurs points concernant l'existence d'une indemnité de gestion d'un bien indivis et d'une rémunération due par l'autre enfant nu-propriétaire à son frère occupant le bien et y ayant financé des travaux.
Cass. civ. 1re, 2 mars 2022, n° 20-21.641 (V. annexe 3)
Libéralités-partages - Testament-partage - Notion - Caractère facultatif des attributions - Dans le cadre d'un contentieux successoral, une cour d'appel annula des testaments authentiques dressés le même jour, pour des époux mariés en régime de communauté, et léguant dans des termes quasi identiques la quotité disponible de la succession à l'un des enfants du couple et organisant un droit de priorité sur le choix de meubles et une faculté d'attribution préférentielle sur certains biens. Les juges du fond considérèrent en effet qu'il s'agissait de testaments-partages, nuls en ce qu'ils s'étendaient à des biens dépendant de la communauté conjugale. La Cour de cassation juge au contraire que les attributions prévues par les testaments, en raison de leur caractère facultatif, n'imposaient aucun partage aux héritiers et qu'il ne s'agissait donc pas de testaments-partages.
Cass. civ. 1re, 13 avr. 2022, n° 20-17.199 (V. annexe 4)
Succession - Succession internationale - Règlement successions - Compétences juridictionnelles subsidiaires - La CJUE juge que l'article 10, § 1, a) du règlement successions du 4 juillet 2012 doit être interprété en ce sens qu'une juridiction d'un État membre doit relever d'office sa compétence au titre de la règle de compétence subsidiaire prévue à cette disposition lorsque, ayant été saisie sur le fondement de la règle de compétence générale établie à l'article 4 de ce règlement, elle constate qu'elle n'est pas compétente au titre de cette dernière disposition.
CJUE, 5e ch., 7 avr. 2022, C-645/20, V A et Z A (IP 3-2022, n° 7, § 23)
Succession - Succession internationale - Règlement successions - Certificat successoral européen - Délivrance des fonds - La Cour de cassation juge que malgré la présentation d'un certificat successoral européen par un héritier, une banque peut soumettre la délivrance des fonds à la preuve d'enregistrement en France du testament ayant institué l'héritier.
Cass. civ. 1re, 13 avr. 2022, n° 20-23.530 (IP 3-2022, n° 7, § 19)
Succession - Succession internationale - Règlement successions - Validité formelle d'une déclaration de renonciation - La CJUE juge qu'une déclaration concernant la renonciation à la succession faite par un héritier devant une juridiction de l'État membre de sa résidence habituelle est considérée comme valable quant à la forme dès lors que les exigences de forme applicables devant cette juridiction ont été respectées, sans qu'il soit nécessaire, aux fins de cette validité, qu'elle remplisse les exigences de forme requises par la loi applicable à la succession.
CJUE, 5e ch., 2 juin 2022, C-617/20, T.N. et N.N., concl. M. Szpunar (V. annexe 5)
Succession - Liquidation - Rapport successoral - Intérêts des choses sujettes à rapport - La Cour de cassation juge à propos de donations prévoyant le mode de calcul du rapport que les intérêts étaient nécessairement dus à compter du décès du donateur, et non du jour de la décision des juges du fond.
Cass. civ. 1re, 18 mai 2022, n° 20-20.117 (V. annexe 6)
Succession - Liquidation - Action en réduction d'une donation-partage - Qualité pour agir - Procédure collective - Un héritier réservataire, lésé par une donation-partage consentie par ses parents à ses frères et sœurs, qui se trouvait être en liquidation judiciaire, vit une cour d'appel lui refuser la qualité à agir en réduction de la donation-partage au profit de son liquidateur judiciaire qui, en application de l'article L. 641-9 du code de commerce, exerce les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine. La Cour de cassation remet en cause l'arrêt des juges d'appel et, articulant les principes du code de commerce avec ceux de l'article 1077-1 du code civil, juge que, malgré son incidence patrimoniale, l'action en réduction de la donation-partage est une action attachée à la personne de l'héritier réservataire lésé qui échappe au dessaisissement opéré en faveur du liquidateur judiciaire.
Cass. com., 2 mars 2022, n° 20-20.173 (V. annexe 7)
Succession - Liquidation - Partage - Attribution préférentielle - Exploitation agricole - La Cour de cassation rappelle les principes et envisage l'exploitation agricole plus comme une unité économique que par référence au seul droit de propriété du coindivisaire.
Cass. civ. 1re, 23 mars 2022, n° 20-22.567 (V. annexe 8)
Donation - Donation rémunératoire entre époux - Exemple (remise d'une somme de 457.000 €) - Dans le cadre d'un règlement successoral, les enfants d'un premier lit du de cujus s'opposèrent au conjoint survivant au sujet d'une somme de 457.000 € reçue par ce dernier de la part du défunt. Le gratifié, qui disposait d'une qualification et d'une expérience professionnelle qui lui auraient permis de faire carrière dans la publicité et de créer son propre cabinet, y avait renoncé pour s'occuper sérieusement des enfants du couple et permettre à son conjoint de gérer ses affaires. Les juges d'appel, estimant souverainement que le gratifié avait, par ses activités, excédé son obligation de contribution aux charges du mariage, jugèrent que le versement litigieux avait pour objet de compenser les sacrifices et l'intense activité au foyer par l'un des époux. Ce versement s'analysait donc en une donation rémunératoire. Le pourvoi dirigé contre l'arrêt d'appel est rejeté par la Cour de cassation sur ce point.
Cass. civ. 1re, 9 févr. 2022, n° 20-14.272 (V. annexe 1)
Testament - Testament international - Exigence de rédaction dans une langue comprise du testateur - Indifférence de l'aide d'un interprète - Le testament d'une personne de nationalité et de langue italienne fut reçu par un notaire français, en langue française, en présence de deux témoins et avec le concours d'un interprète italien. Les prétentions de l'un des descendants, exhérédé, furent écartées par les juges du fond qui, s'ils admirent l'annulation du testament authentique pour non-respect des règles de forme du code civil, le validèrent en tant que testament international conforme aux règles prescrites par la convention de Washington du 26 octobre 1973. La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel en jugeant que, si le testament international peut être écrit en une langue quelconque afin de faciliter l'expression de la volonté de son auteur, celui-ci ne peut l'être en une langue que le testateur ne comprend pas, même avec l'aide d'un interprète.
Cass. civ. 1re, 2 mars 2022, n° 20-21.068 (V. annexe 2)
Succession - Liquidation - Réserve héréditaire - Mécanisme de protection (C. civ., art. 918) - Aliénations quasi-concomitantes de biens identiques avec réserve d'usufruit au profit de chacun des enfants - Objectif global de transmission, connu et accepté par l'ensemble des héritiers réservataires - Un parent avait donné le même nombre de titres d'une société, à deux jours d'écart et à chacun de ses enfants, en se réservant l'usufruit des biens donnés. Un contentieux est né du règlement de sa succession dans laquelle son nouveau conjoint marié était légataire d'un quart en propriété. Les enfants considéraient que, dans le cadre des opérations de liquidation de leur réserve héréditaire, la valeur en propriété des titres cédés devait être imputée sur la quotité disponible, en application de l'article 918 du code civil. Cette imputation sur la quotité disponible réduisait mécaniquement l'assiette disponible pour l'imputation du legs consenti à leur belle-mère. Les juges du fond, suivis en cela par la Cour de cassation, rejetèrent leurs prétentions en considérant que le caractère strictement identique et la quasi-concomitance des cessions des parts sociales opérées à leur profit à la suite d'actes de même nature démontraient qu'elles poursuivaient un objectif global de transmission, connu et accepté par l'ensemble des héritiers réservataires. Dès lors, il n'était pas possible aux enfants de soutenir qu'ils n'avaient pas consenti à ces aliénations comme l'exige l'article 918 du code civil.
Cass. civ. 1re, 26 janv. 2022, n° 20-14.155 (V. annexe 3)
Succession - Liquidation - Paiement des créanciers de la succession - Succession déclarée vacante - Arrêt du cours des inscriptions hypothécaires - La Cour de cassation juge qu'il résulte de la combinaison des article 810-4, 810-5 et 2427, alinéa 2 du code civil que les règles qui organisent le paiement des créanciers de la succession n'excluent pas l'application du principe de l'arrêt du cours des inscriptions hypothécaires et que la mainlevée d'une inscription hypothécaire faite postérieurement au décès peut être demandée par le curateur d'une succession déclarée vacante.
Cass. civ. 3e, 5 janv. 2022, n° 20-21.359 (V. annexe 4)
Succession - Liquidation - Recel successoral - Dissimulation d'une donation rapportable de deniers employés dans l'acquisition d'un bien - Application du mécanisme de la dette de valeur - Un parent donna une somme d'argent à l'un de ses enfants qui l'employa dans l'acquisition de la nue-propriété d'un immeuble. N'ayant pas révélé l'existence de cette donation dans le cadre du règlement de la succession du donateur, le donataire fut assigné en rapport de donations et recel successoral. Les juges d'appel, après avoir énoncé que le notaire en charge de la succession devra déterminer la valeur actuelle de l'immeuble recelé, a retenu que les intérêts de retard au taux légal sur la valeur de cet immeuble seraient dus à compter de la date de l'assignation, soit le 20 avril 1998. La Cour de cassation censure l'arrêt, au visa de l'article 856 du code civil (rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006) en raison de la nature de la dette de l'héritier coupable de recel. Étant redevable d'une somme représentant la valeur du bien acquis au moyen des deniers reçus par donation à la date du partage, les intérêts de la dette de valeur ne sont dus qu'à compter du jour où cette valeur est déterminée.
Cass. civ. 1re, 15 déc. 2021, n° 20-15.345 (V. annexe 5)
Succession - Liquidation - Rapport successoral - Avantages indirects - Caractérisation de l'intention libérale - Dans le cadre du règlement d'une succession, un litige est intervenu entre héritiers au sujet de l'obligation au rapport de l'avantage qu'a constitué, pour l'un d'eux, la mise à disposition gratuite par leur parent de bâtiments et terres agricoles. La cour d'appel qualifia cette mise à disposition gratuite d'avantage indirect rapportable à la succession. Cependant, la Cour de cassation censure l'arrêt des juges du fond qui n'ont pas, concernant cette mise à disposition gratuite, caractérisé l'intention libérale des parents à l'égard de leur enfant.
Cass. civ. 1re, 12 janv. 2022, n° 20-14.455 (V. annexe 6)
Succession - Liquidation - Rapport successoral - Application aux seuls héritiers ab intestat du défunt - Une grand-mère avait donné une somme d'argent à deux de ses petits-enfants. Le partage de sa succession fût à l'origine d'un contentieux relatif au rapport de ces deux donations. La Cour de cassation casse un arrêt d'appel ayant jugé que la fille de la défunte et mère des deux donataires devait le rapport desdites donations. Le rapport des libéralités n'étant dû que par les héritiers ab intestat du défunt et les donations ayant été consenties aux petits-enfants qui n'ont pas cette qualité, celles-ci ne pouvaient en effet être prises en compte dans le cadre du partage de la succession.
Cass. civ. 1re, 15 déc. 2021, n° 20-12.825 (V. annexe 7)
Succession - Liquidation - Droit viager au logement du conjoint survivant - Possibilité d'option tacite (oui) - Option résultant du seul maintien dans les lieux (non) - Une cour d'appel jugea qu'un conjoint survivant, en se maintenant dans l'ancienne habitation principale commune du couple pendant une durée excédant 1 an à compter de l'ouverture de la succession, avait formé dans les temps une demande tacite de bénéficier du droit viager au logement sur ladite habitation. La Cour de cassation juge au contraire que, si la manifestation de volonté du conjoint survivant peut être tacite, elle ne peut résulter du seul maintien dans les lieux.
Cass. civ. 1re, 2 mars 2022, n° 20-16.674 (V. annexe 8)
Succession - Liquidation - Droits du conjoint survivant - Rapport spécial en moins prenant - 1° Donation déguisée constituée par un pacte tontinier entre époux - 2° Legs particulier - La Cour de cassation se prononce dans deux espèces mettant en jeu le rapport spécial en moins prenant : 1° Un couple avait acquis un immeuble dans le cadre d'un pacte tontinier. Cette opération ayant été requalifiée en donation déguisée du mari envers son épouse, une cour d'appel a jugé que le conjoint survivant devait rapporter cette libéralité à la succession de son époux. L'épouse, qui invoquait le caractère spécial de son obligation au rapport successoral et prétendait qu'il ne pouvait consister qu'en un moins prenant sur ses droits légaux et non en une obligation de restitution à la masse partageable, est déboutée par la Cour de cassation qui confirme l'arrêt d'appel ayant ordonné le rapport de la donation à la succession. 2° Un de cujus avait consenti un legs particulier d'une maison d'habitation garnie de ses meubles et d'une certaine somme d'argent à son conjoint. Le règlement de la succession a vu s'opposer ce dernier aux enfants du défunt quant à la possibilité pour lui de cumuler ses droits légaux (en l'espèce, son quart en pleine propriété) et son legs particulier. La Cour de cassation confirme l'arrêt d'appel ayant refusé un tel cumul. Il résulte en effet de la combinaison des articles 758-5 et 758-6 du code civil que le conjoint survivant est tenu à un rapport spécial en moins prenant des libéralités reçues par lui du défunt, et la dispense générale de rapport successoral des legs prévue à l'article 843 du code civil n'y change rien.
Cass. civ. 1re, 12 janv. 2022, n° 20-12.232 (V. annexe 9)
Droits de succession - Exonération en faveur des monuments historiques (CGI, art. 795 A) - Convention conclue avec l'État - Dépôt de la demande de convention - Suspension du paiement des droits - L'exonération instituée par l'article 795 A du CGI est subordonnée à la conclusion d'une convention avec l'État (ministère de la culture et ministère des finances) prévoyant notamment les modalités d'accès du public et de conservation sur place du mobilier. Le Conseil d'État : 1° juge que la demande de convention adressée aux services compétents du ministère de la culture pour bénéficier de l'exonération ne saurait être regardée comme une « demande d'agrément déposée en vue de la réalisation d'une opération », au sens de l'article 1649 nonies du CGI qui prévoit que, sauf disposition expresse contraire, toute demande d'agrément auquel est subordonnée l'application d'un régime fiscal particulier doit être déposée préalablement à la réalisation de l'opération qui la motive. Le Conseil d'État écarte en conséquence l'argumentation du ministre selon laquelle, en vertu de ce texte, le contribuable serait tenu, à peine de perte du droit à exonération, de déposer un projet de convention préalablement à l'expiration du délai de déclaration de succession ; 2° distingue la question du droit à exonération de la question de la suspension de paiement des droits de mutation. Il juge que le I de l'article 281 bis de l'annexe III au CGI a pour seul objet de prévoir, en application de l'article 1717 du CGI, les modalités selon lesquelles le paiement des droits de mutation par décès exigibles en vertu de l'article 1701 de ce code peut être différé jusqu'à la signature de la convention prévue par l'article 795 A permettant l'exonération de ces droits de mutation mais que ces dispositions n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de subordonner le bénéfice de cette exonération au dépôt d'une déclaration de succession accompagnée d'une copie de la convention adressée au service du département de la culture compétent et certifiée conforme par celui-ci.
CE, 8e et 3e ch., 11 févr. 2022 et n° 458465, Min. c/ Espinay de Saint Luc, et n° 454999, Espinay de Saint Luc, concl. K. Ciavaldini (V. annexe 11)
Libéralités - Pacte successoral - Règlement successions - La CJUE juge que : 1° constitue un pacte successoral, au sens de l'article 3, § 1, b) du règlement successions, un contrat en vertu duquel une personne prévoit le transfert futur, lors de son décès, de la propriété d'un bien immobilier lui appartenant à d'autres parties contractantes ; 2° L'article 83, § 2 du règlement n'est pas applicable à l'examen de la validité du choix de la loi applicable, effectué avant le 17 août 2015, pour régir uniquement un pacte successoral, au sens de l'article 3, § 1, b) de ce règlement, portant sur un bien particulier du de cujus, et non la succession de ce dernier dans son ensemble.
CJUE, 1re ch., 9 sept. 2021, C-277/20, UM (IP 1-2022, n° 7, § 40)
Donation-partage - Fraude paulienne - Prescription - La Cour de cassation rappelle que l'action paulienne, qui vise à rendre inopposable à un créancier l'acte fait par l'un de ses débiteurs en fraude de ses droits, est une action de nature personnelle soumise à la prescription de droit commun de l'article 2224 du code civil, courant à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, et que ce n'est que lorsque la fraude du débiteur a empêché le créancier d'exercer son action que le point de départ en est reporté au jour où il a effectivement connu l'existence de l'acte fait en fraude de ses droits. Lorsqu'un acte de donation-partage a été régulièrement porté à la connaissance des tiers du fait de sa publication au service de la publicité foncière, une banque est réputée avoir connaissance de son existence dès cette date. Une action qu'elle engage plus de cinq ans après est donc prescrite.
Cass. civ. 3e, 8 déc. 2021, n° 20-18.432, Crcam de Normandie c/ G et a. (V. annexe 1)
Succession - Succession internationale - Loi applicable - Déclinatoire de compétence - La CJUE juge que : 1° L'article 7, a) du règlement successions doit être interprété en ce sens que, pour qu'il y ait déclinatoire de compétence, au sens de l'article 6, a) de ce règlement, en faveur des juridictions de l'État membre dont la loi a été choisie par le défunt, il n'est pas nécessaire que la juridiction préalablement saisie ait décliné sa compétence de manière expresse, mais il faut que cette intention ressorte sans équivoque de la décision qu'elle a rendue à cet égard ; 2° L'article 6, a), l'article 7, a) et l'article 39 du règlement doivent être interprétés en ce sens que la juridiction de l'État membre saisie à la suite d'un déclinatoire de compétence n'est pas habilitée à contrôler si les conditions établies à ces dispositions étaient réunies pour que la juridiction préalablement saisie puisse décliner sa compétence ; 3° L'article 6, a) et l'article 7, a) du règlement doivent être interprétés en ce sens que les règles de compétence prévues à ces dispositions trouvent à s'appliquer également dans le cas où, dans son testament établi avant le 17 août 2015, le défunt n'avait pas choisi la loi applicable à la succession et où la désignation de cette loi résulte du seul article 83, § 4 de ce règlement.
CJUE, 6e ch., 9 sept. 2021, C-422/20, RK (V. annexe 8)
Succession - Dévolution - Droit de retour légal - Créance de salaire différé - Collatéraux privilégiés - Un enfant s'était vu attribuer des parcelles dans le partage de la succession de son parent, pour partie au titre de ses droits successoraux, et pour partie au titre d'une créance de salaire différé. À la suite de son décès intervenu quelques années plus tard, ses sœurs ont revendiqué l'application d'un droit de retour légal sur lesdites parcelles qui se retrouvaient en nature dans la succession de leur frère, décédé sans descendant. La Cour de cassation casse un arrêt d'appel ayant jugé que le droit de retour s'appliquait à l'intégralité des parcelles reçues dans le partage. Elle souligne que les biens reçus de son ascendant par le défunt en règlement d'une créance de salaire différé échappent au droit de retour légal des collatéraux privilégiés.
Cass. civ. 1re, 1er déc. 2021, n° 20-12.315 (V. annexe 2)
Succession - Liquidation - Rapport successoral - Immeuble donné sur lequel le donataire a réalisé des travaux - Évaluation - Un enfant reçut un immeuble par donation. Il en conserva la propriété pendant plusieurs décennies et finança des travaux sur son bien avant de le vendre. Dans le cadre du règlement de la succession du donateur, un litige s'éleva concernant la valeur devant être rapportée à la succession par cet enfant au titre de sa donation rapportable. Les juges d'appel évaluèrent la valeur de rapport au prix de cession de l'immeuble minoré du montant des travaux et dépenses réalisés par le donataire postérieurement à la donation. L'arrêt est cassé par les juges du droit qui, rappelant les règles posées par l'article 860 du code civil, considèrent que les juges du fond auraient dû rechercher la valeur que l'immeuble aurait eue à l'époque du partage dans l'état où il se trouvait, au moment de la donation, sans s'attacher aux travaux réalisés par la donataire.
Cass. civ. 1re, 17 nov. 2021, n° 19-23.218 (V. annexe 3)
Succession - Liquidation - Réduction en valeur - Calcul - La Cour de cassation juge qu'en l'absence d'indivision entre le bénéficiaire de la libéralité et l'héritier réservataire et, par conséquent, en l'absence de partage, le montant de l'indemnité de réduction se calcule d'après la valeur des biens donnés ou légués à l'époque de sa liquidation ou de leur aliénation par le gratifié.
Cass. civ. 1re, 1er déc. 2021, n° 20-12.923 (V. annexe 4)
Succession - Liquidation - Rapport des libéralités - Action en partage judiciaire - Partage amiable - Recel successoral - Par un arrêt du 6 novembre 2019, la Cour de cassation avait indiqué que « les demandes en rapport d'une libéralité dont aurait bénéficié un héritier et en application de la sanction du recel successoral ne peuvent être formées qu'à l'occasion d'une action en partage judiciaire ; qu'une telle action ne peut plus être engagée lorsque les parties, ayant déjà procédé au partage amiable de la succession, ne sont plus en indivision »8. Par une décision du 29 septembre 2021, elle réitère cette solution, tout en laissant de côté une difficulté qu'il aurait été utile de trancher.
Cass. civ. 1re, 29 sept. 2021, n° 19-26.029 et 20-13.648 (V. annexe 5)
Droits de succession - Exonération en faveur des monuments historiques (CGI, art. 795 A) - Formalités obligatoires - Dépôt d'une demande de convention avec la DRAC - La CAA de Douai : 1° suivant la position retenue tant par le tribunal de première instance que par la CAA de Versailles pour une demande portant sur la même succession (CAA Versailles, 27 mai 2021, n° 19VE01380, Min. c/ Espinay Saint Luc), juge qu'aucune disposition du CGI ne subordonne le bénéfice de l'exonération prévue en faveur des monuments historiques au dépôt de la déclaration de succession dans les délais prévus par les textes et que, par suite, le ministre ne pouvait refuser d'octroyer l'agrément sur ce fondement sans commettre d'erreur de droit ; 2° refuse de suivre la position de l'administration, qui affirmait que le dépôt de la demande de convention au service de la conservation des monuments historiques de la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) dans le délai de six mois suivant le décès ne valait pas dépôt au service des impôts compétent. Si la cour confirme que la formalité de dépôt dans un délai de six mois au sens de l'article 281 bis de l'annexe III au CGI n'avait pas été accomplie, elle juge néanmoins, au contraire de la Cour de Versailles quelques mois plus tôt, que l'absence de respect de cette formalité n'entraîne pas, par elle-même, la déchéance du droit à l'exonération, mais rend seulement exigible le paiement des droits de mutation, sans empêcher le contribuable, dans le cadre d'une réclamation, d'en solliciter le dégrèvement.
CAA Douai, 4e ch., 16 sept. 2021, n° 19DA02608, Espinay Saint-Luc (V. annexe 6)
Droits de succession - Actif successoral - 1° Évaluation des parts de SICAV affectées par l'affaire Madoff - 2° Droit à restitution au titre du bouclier fiscal acquis après l'ouverture de la succession - La Cour de cassation juge que : 1° il était nécessaire d'apprécier la valeur (ou non-valeur) des parts de SICAV affectées par l'affaire Madoff pour l'évaluation de l'assiette imposable des successions ouvertes à l'époque où le scandale éclatait ; 2° le droit à restitution au titre du bouclier fiscal, acquis après l'ouverture de la succession, doit être intégré à l'actif successoral pour le calcul des droits de succession.
Cass. com., 13 oct. 2021, n° 19-13.548 (V. annexe 7)
Succession - Réserve héréditaire - Nouveau droit de prélèvement - Action en réduction : nouvelle obligation d'information à la charge du notaire - La loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République comporte deux dispositions qui intéressent le droit des successions, plus précisément la réserve héréditaire. Pour les successions ouvertes à compter du 1er novembre 2021, il est institué un nouveau droit de prélèvement compensatoire lorsque la loi étrangère applicable à la succession ne permet aucun mécanisme réservataire protecteur des enfants. En outre, une nouvelle obligation d'information est mise à la charge du notaire : lorsqu'il constate, lors du règlement de la succession, que les droits réservataires d'un héritier sont susceptibles d'être atteints par les libéralités effectuées par le défunt, il doit informer chaque héritier de son droit de demander la réduction des libéralités excédant la quotité disponible.
L. n° 2021-1109, 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, art. 24 : JO 25 août 2021, texte n° 1 (IP 4-2021, n° 7, § 21)
Libéralité - Notion - Exigence d'un appauvrissement du disposant - Cession de parts sociales par une société - Donation déguisée -La Cour de cassation refuse de voir une donation déguisée, par un époux à sa seconde épouse, dans la cession de parts sociales à prix minoré par une société dont l'époux était associé et alors même qu'il avait participé à la cession. La Cour estime qu'à partir du moment où le défunt n'était pas propriétaire des parts litigieuses, il ne pouvait pas en disposer, même de manière déguisée. Dès lors que le patrimoine du disposant n'avait pas subi d'appauvrissement, il ne pouvait pas y avoir de libéralité.
Cass. civ. 1re, 7 juill. 2021, n° 19-23.580 (V. annexe 1)
Libéralités - Testament olographe - Testament olographe rédigé dans une langue que ne comprenait pas le testateur - Un testateur de nationalité allemande rédigea un testament olographe en langue française alors même qu'il ne comprenait pas cette langue et y adjoint une traduction en langue allemande datée du même jour et non écrite de sa main. Ayant constaté que les deux documents ne se contredisaient pas, les juges d'appel ont admis la validité du testament. La Cour de cassation casse cet arrêt en considérant que le testament rédigé dans une langue non comprise du testateur ne pouvait être considéré comme étant l'expression de sa volonté.
Cass. civ. 1re, 9 juin 2021, n° 19-21.770 (IP 3-2021, n° 7, § 41)
Action en paiement de la créance de salaire différé - Action en partage - Différence de finalité - Prescription - La Cour de cassation juge qu'il résulte de l'article 2241 du code civil que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent aux mêmes fins, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première. Elle précise que l'action en versement d'un salaire différé, qui ne tend ni à la liquidation de l'indivision successorale ni à l'allotissement de son auteur, n'a pas la même finalité que l'action en partage. Dès lors, l'interruption de prescription due à l'introduction d'une action en partage ne peut s'appliquer à la créance de salaire différé.
Cass. civ. 1re, 7 juill. 2021, n° 19-11.638 (V. annexe 2)
Cessions de parts sociales à prix symbolique dans un cadre familial - Fictivité - Requalification - Abus de droit fiscal - L'administration fiscale a procédé à la requalification d'opérations de cession de parts sociales au prix d'un euro dans le cadre de la procédure de l'abus de droit fiscal. La Cour de cassation juge qu'une cour d'appel a pu retenir la fictivité des cessions à partir d'éléments factuels de l'espèce (prix symbolique des titres dont l'évaluation était de 750 000 €, opérations réalisées entre un père cédant et son fils cessionnaire deux jours avant le décès du premier, contexte de restructuration d'un groupe de sociétés dans un climat de mésentente familiale et de désintérêt des frères du cessionnaire dans la conduite du groupe, connaissance des parties de la valeur réelle des biens cédés, etc.), peu important que l'opération ait présenté un intérêt familial et patrimonial.
Cass. com., 7 juill. 2021, n° 19-16.446 (V. annexe 3)
Tontine - Acquisition immobilière indivise d'époux mariés assortie d'un pacte tontinier dépourvu d'aléa - Abus de droit - Des époux mariés sous le régime de la séparation de biens avaient acquis indivisément un immeuble en prévoyant dans l'acte d'acquisition une clause d'accroissement (pacte tontinier) en faveur du survivant des époux. À la suite du décès du premier époux, médecin atteint d'une longue maladie, moins de 2 mois après l'opération, l'épouse devint rétroactivement seule propriétaire de l'immeuble. Le Comité de l'abus de droit fiscal considère, à la suite de l'administration fiscale, que les opérations étant dépourvues d'aléa, la clause d'accroissement consistait en une donation déguisée entre époux, taxable aux droits de mutation à titre gratuit.
CADF/AC n° 4/2021, 6 mai 2021, aff. n° 2021-08 (V. annexe 4)
Droits de mutation à titre gratuit - Abattement spécial de 159 325 € en faveur des personnes handicapées - Exemple de handicap non visé par l'abattement - L'article 779, II du CGI prévoit que, pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, il est appliqué un abattement de 159 325 € sur la part de tout héritier, légataire ou donataire, incapable de travailler dans des conditions normales de rentabilité, en raison d'une infirmité physique ou mentale, congénitale ou acquise. En l'espèce, le bénéfice de cet abattement est refusé à un contribuable souffrant d'un handicap lié à l'énucléation de l'œil gauche dans la mesure notamment où il justifie d'une carrière stable d'une durée de vingt-six années, comme dessinateur et qu'il n'apporte aucun élément établissant qu'il aurait été dans l'impossibilité de poursuivre des études supérieures ou aurait subi une limitation de son activité professionnelle ou un blocage de son avancement en lien avec son état de santé.
Cass. com., 23 juin 2021, n° 19-16.680 (V. annexe 5)
Droits de mutation à titre gratuit - Succession de militaires et de victimes de certaines persécutions - L'administration fiscale met à jour ses commentaires à la suite de la réforme de l'article 796 du CGI par l'article 43 de la loi n° 2020-1721 de finances pour 2021 prévoyant l'exonération de droits de mutation à titre gratuit des successions des militaires décédés lors de leur participation à certaines opérations. Elle apporte également une précision sur le régime de déduction de l'actif successoral taxable des sommes allouées aux victimes de certaines persécutions.
BOI-ENR-DMTG-10-20-10, 29 juin 2021. - BOFiP, actualité, 29 juin 2021
Legs à une association - Association dépourvue de la capacité de recevoir une libéralité - Nullité du legs - Un contentieux a émergé à la suite du legs universel consenti par une personne à une fondation œuvrant dans le domaine de la défense des animaux, à charge pour celle-ci de distribuer la moitié du legs à une association désignée (un refuge canin) dépourvue de la capacité de recevoir à titre gratuit. Alors que les juges d'appel avaient autorisé un autre organisme, la confédération nationale des SPA de France et des pays d'expression française, à accepter le legs consenti à l'association à charge pour elle d'en affecter le montant à une action de ladite association afin de respecter la volonté de la testatrice, la Cour de cassation juge que le legs fait à une personne dépourvue de la capacité de recevoir à titre gratuit est nul. L'arrêt d'appel est donc cassé.
Cass. civ. 1re, 14 avr. 2021, n° 19-19.306 (V. annexe 1)
: Legs graduel faussement qualifié de legs résiduel - Évaluation du préjudice de perte de chance - Déduction de l'économie d'impôt induite par l'erreur de qualification - Dans le cadre d'un partage successoral, le notaire en charge de la succession a interprété un legs graduel comme étant un legs résiduel. Le légataire en premier ayant vendu le bien légué, le légataire en second a perdu un chance d'hériter du bien légué, au décès du légataire en premier, du fait de sa qualification erronée en libéralité résiduelle. Dans le cadre du contentieux en responsabilité civile du notaire, les juges du fond ont évalué cette perte de chance à 85 % du prix de vente de l'immeuble. La Cour de cassation casse l'arrêt d'appel en jugeant que les juges du fond auraient dû vérifier si, en raison de l'erreur de qualification, le légataire en second n'avait pas bénéficié d'une économie d'impôt de nature à réduire son préjudice.
Cass. civ. 1re, 14 avr. 2021, n° 19-21.290 (V. annexe 2)
Donation-partage - Testament - Clause pénale pour le cas où l'acte serait contesté en justice - Droit d'agir en justice - Un testament ainsi que des clauses d'actes de donation-partage prévoyaient qu'en cas de contestation des transmissions par l'un des gratifié, pour quelque cause que ce soit, celui-ci serait privé de toute part dans la quotité disponible de la succession ainsi que des biens transmis. La Cour de cassation confirme qu'une telle clause, qualifiée de clause pénale par les juges du fond, n'est valable que si son application n'a pas pour effet de porter une atteinte excessive au droit d'agir en justice du gratifié, garanti par l'article 6, § 1 de la Convention EDH.
Cass. civ. 1re, 31 mars 2021, n° 19-24.407 (V. annexe 3)
Donation - Intention libérale (non) - Donation de terres agricoles louées en bail à métayage - Contournement du droit de préemption du preneur - Nullité de la donation - La Cour de cassation confirme un arrêt par lequel les juges du fond ont souverainement apprécié l'absence d'intention libérale d'une donation de terres agricoles louées par bail à métayage et décelé dans l'opération une manœuvre frauduleuse destinée à contourner le droit de préemption des preneurs à bail. Parmi les éléments factuels retenus figuraient notamment : les vains essais de résiliation du bail par le propriétaire, la circonstance que la donation a été consentie à des inconnus, un contexte belliqueux entre les personnes objectivé par des procédures judiciaires.
Cass. civ. 3e, 15 avr. 2021, n° 20-15.342 (V. annexe 4)
Donation - Donation indirecte - Prêt à un futur conjoint - Absence de dépouillement irrévocable du prêteur - Une personne avait prêté environ 800 000 € à une autre personne (avec laquelle elle se marierait plus tard) pour l'acquisition d'un bien immobilier. Plus tard, l'emprunteur remboursa la somme de 429 725 € grâce au produit de la vente d'un immeuble possédé par ailleurs. Enfin, l'emprunteur consentit au prêteur une donation entre vifs (entre époux) de la moitié indivise de l'immeuble dont l'acquisition avait été financée par le prêt. L'administration fiscale, suivie en cela par les juges du fond, requalifia l'acquisition initiale en donation indirecte en raison de son financement à hauteur du montant non remboursé par l'emprunteur (422 215 €). La Cour de cassation casse l'arrêt d'appel en considérant qu'en raison de la donation subséquente de la moitié de la quote-part indivise de l'immeuble, le prêteur ne s'était pas dépouillé de façon irrévocable dans ces opérations.
Cass. com., 14 avr. 2021, n° 18-15.623 (V. annexe 5)
Succession - Liquidation du passif - Charges de la succession - Frais funéraires - Obligation de prise en charge par les enfants - Exception lorsque l'ascendant a manqué gravement à ses obligations envers eux - La Cour de cassation juge qu'il résulte de la combinaison des articles 205, 207, 371 et 806 du code civil que, lorsque l'actif successoral ne permet pas de faire face aux frais d'obsèques, un enfant doit en principe, même s'il a renoncé à la succession, assumer la charge de ces frais, dans la proportion de ses ressources. Il peut toutefois en être déchargé en tout ou partie lorsque son ascendant a manqué gravement à ses obligations envers lui (exception d'indignité à l'exécution d'une obligation alimentaire). En l'espèce, le défunt n'avait jamais cherché à entrer en contact avec son enfant ni à lui donner de nouvelles et, s'étant désintéressé de lui, n'avait pas participé à son entretien ni à son éduction. L'arrêt d'appel ayant écarté l'obligation au paiement des frais funéraires est donc confirmé.
Cass. civ. 1re, 31 mars 2021, n° 20-14.107 (V. annexe 6)
Succession - Liquidation de l'actif - Réduction des libéralités - Succession internationale ouverte avant le 17 août 2015 - Juge compétent - La Cour de cassation juge que la détermination de la juridiction compétente ne dépend pas de la loi applicable au litige, mais de la nature de l'action successorale. L'action en réduction étant de nature mobilière, elle relève en droit international privé français (règles antérieures au règlement successions) de la compétence du juge de l'État du dernier domicile du défunt.
Cass. civ. 1re, 14 avr. 2021, n° 19-24.773 (IP 3-2021, n° 7, § 33)
Impôts sur les successions et les donations - Comparaison entre les pays de l'OCDE - Recommandations pour lutter contre les inégalités - L'OCDE publie son rapport « L'impôt sur les successions dans les pays de l'OCDE », lequel procède à une évaluation comparative des impôts sur les successions et les donations dans les 37 pays membres de l'OCDE et analyse le rôle que ces impôts pourraient jouer pour accroître les recettes, lutter contre les inégalités et améliorer l'efficacité des systèmes d'imposition à l'avenir. Ce rapport met en avant que les impôts sur les successions pourraient réduire la concentration des richesses constatées dans les pays de l'OCDE et la répartition inégale des successions. Il indique également que les impôts sur les successions tendent à générer moins de distorsions que d'autres formes de taxation des personnes fortunées et sont plus faciles à établir et à collecter que d'autres formes d'imposition du patrimoine. Enfin, ce rapport suggère un certain nombre d'options de réforme afin d'améliorer la collecte des recettes, l'efficacité et l'équité des impôts sur les successions et les donations.
OCDE, L'impôt sur les successions dans les pays de l'OCDE, rapport 11 mai 2021
Donations entre époux - Donations antérieures au 1er janvier 2005 - Révocabilité - Libéralité rémunératoire - La Cour de cassation juge, à propos de versements d'un époux sur un compte joint de sommes qui avaient permis à l'autre époux d'acquérir certains biens immobiliers, qu'il revient au premier époux d'établir son intention libérale pour faire tomber ce qui s'apparente à une présomption de libéralité rémunératoire.
Cass. civ. 1re, 16 déc. 2020, n° 19-13.701 (V. annexe 1)
Libéralités - Incapacité à recevoir à titre gratuit - Aides à domicile - Droit de propriété - Constitution - Les dispositions combinées du code de l'action sociale et de la famille et du code du travail conduisent à l'interdiction, pour les personnes âgées ou handicapées ayant recours aux services d'aides à domicile, de disposer à titre gratuit de leur patrimoine à leur bénéfice, tant qu'elles ont recours à leurs services. Le Conseil constitutionnel juge que cette limitation générale à un attribut du droit de propriété, en ce qu'elle est susceptible de s'appliquer à des personnes dont il n'est pas établi que leur discernement est altéré et sans leur offrir la possibilité de prouver leur absence de vulnérabilité, porte une atteinte disproportionnée à ce droit. Les dispositions en cause sont donc jugées contraires à la Constitution et censurées à compter du 12 mars 2021.
CC, 12 mars 2021, n° 2020-888, Fouzia L. - Cass. civ. 1re, 18 déc. 2020, QPC, n° 20-40.060 (V. annexe 2)
Libéralités - Révocation pour ingratitude - Exercice par les héritiers du donateur - Légataire universel - La Cour de cassation juge que l'action en révocation d'une donation pour ingratitude ne peut être intentée par les héritiers du donateur, sauf si elle a été intentée du vivant du donateur ou si ce dernier est décédé dans l'année du délit. La Cour de cassation casse un arrêt d'appel ayant refusé de considérer qu'un légataire universel du défunt donateur est un héritier au sens de ces règles.
Cass. civ. 1re, 27 janv. 2021, n° 19-18.278 (V. annexe 3)
Testament - Pluralité de légataires universels - Révocation - Dénaturation de l'acte - La Cour de cassation censure une décision de cour d'appel qui a dénaturé un testament dans lequel il était écrit « en conséquence, après mon décès, je lui léguerai mes biens mobiliers et immobilier qui composeront ma succession ». La cour d'appel, en ajoutant le mot « tous » avant « mes biens […] » a ainsi changé le sens de ce testament qu'il était alors possible de considérer comme révoquant un précédent testament.
Cass. civ. 1re, 13 janv. 2021, n° 19-16.392 (V. annexe 4)
Recel successoral - Élément moral - Preuve - S'appuyant sur le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, la Cour de cassation refuse de caractériser l'élément moral d'un recel successoral après que la plainte pour vol contre un légataire universel déposée par les héritiers légaux a été rejetée par un jugement devenu définitif.
Cass. civ. 1re, 13 janv. 2021, n° 19-16.024 (V. annexe 5)
Succession - Liquidation - Réserve héréditaire - Libéralité excédant la quotité disponible - Réduction en valeur - Date de calcul de l'indemnité - La CA de Versailles juge que si le principe général est celui d'une double évaluation de l'indemnité de réduction, soit détermination de la réduction en formant masse de tous les biens au décès du testateur (C. civ., art. 922) puis calcul du montant de l'indemnité de réduction d'après la valeur des biens légués à l'époque du partage (C. civ., art. 942-2), encore convient-il qu'un partage ait lieu, ce qui ne peut se faire en l'absence d'indivision. Dans une succession avec deux enfants dont l'un est désigné légataire universel, ce dernier détenant la propriété des biens légués à la date du décès, qui est donc la date de la jouissance divise des biens, c'est à cette date que l'indemnité de réduction est due au réservataire et doit être liquidée.
CA Versailles, 1re ch. , 1re sect., 27 oct. 2020, n° 19/05376 (V. annexe 6)
Succession - Liquidation - Rapport successoral - Occupation gratuite d'un immeuble - Charge de la preuve - Dans le cadre du règlement d'une succession, il a été demandé à un cohéritier de rapporter une somme équivalente à la valeur locative d'un immeuble qui aurait été mis à sa disposition par le défunt, gratuitement et pendant plusieurs années. La Cour de cassation censure un arrêt d'appel ayant admis ledit rapport successoral au seul motif que le cohéritier occupait privativement un immeuble du défunt et ne pouvait justifier du paiement d'un loyer pour l'ensemble de la période considérée. Elle rappelle en effet d'une part que les juges auraient dû caractériser l'intention libérale du défunt envers l'occupant de l'immeuble pour juger du caractère rapportable de l'avantage consenti, et d'autre part qu'il appartenait au cohéritier réclamant le rapport successoral de prouver que l'occupation en cause l'avait été à titre gratuit, à défaut de quoi il y aurait inversion de la charge de la preuve.
Cass. civ. 1re, 16 déc. 2020, n° 19-18.472 (V. annexe 7)
Succession - Liquidation - Rapport successoral - Primes manifestement exagérées d'assurance vie - Une cour d'appel a pu souverainement apprécier le caractère manifestement exagéré de primes versées sur ses contrats d'assurance vie (dont l'unique bénéficiaire était l'un de ses enfants) par un souscripteur âgé de plus de 65 ans, pour des montants représentants 61 % de l'actif successoral de sa succession. Les magistrats avaient notamment constaté que ces primes uniques avaient permis la constitution de placements ne présentant aucun intérêt personnel ni économique pour le souscripteur. Pour autant, l'arrêt d'appel est censuré car les juges du fond n'ont pu valablement étendre aux intérêts capitalisés sur les contrats le sort réservé aux primes manifestement exagérées (rapport à la succession et prise en compte pour la liquidation de la réserve héréditaire).
Cass. civ. 1re, 16 déc. 2020, n° 19-17.517 (V. annexe 8)
Successions - Propositions du 116e congrès des notaires - Le 116e congrès des notaires s'est tenu à Paris du 8 au 10 octobre 2020 sur le thème « Protéger les vulnérables, les proches, le logement et les droits ». Plusieurs propositions émises à cette occasion concernent directement le droit des successions : l'octroi d'un droit au logement pour le partenaire survivant, la création d'un pacte familial de transmission, l'imputation des donations en cas de renonciation et la liquidation d'une succession en présence d'une donation-partage.
116e congrès des notaires, 8-10 oct. 2020, Les propositions
Incapacité à recevoir à titre gratuit - Professions médicales - Soins à titre gratuit - Exécuteur testamentaire - La Cour de cassation juge que l'incapacité à recevoir à titre gratuit, qui s'impose notamment au médecin ayant traité le de cujus pendant sa dernière maladie, s'applique peu important que les soins prodigués l'aient été à titre gratuit en raison des liens d'amitié existant entre le médecin et le de cujus. Elle juge par ailleurs que cette incapacité ne saurait entrainer la nullité de codicilles ayant désigné ledit médecin exécuteur testamentaire, ceux-ci ne contenant aucune libéralité au profit dudit médecin.
Cass. civ. 1re, 5 nov. 2020, n° 20-16.879 (V. annexe 1)
Incapacité à recevoir à titre gratuit - Professions médicales - Date de rédaction du testament - Date du diagnostic de la dernière maladie - Une infirmière avait bénéficié du legs d'un de ses malades, au sein d'un testament rédigé, certes avant que le diagnostic définitif de la maladie dont il décèdera soit établi, mais après l'apparition de symptômes et la réalisation des scanner et IRM rendus nécessaires par son état. La Cour de cassation casse l'arrêt d'appel qui avait écarté l'incapacité spéciale de l'infirmière dans cette situation, en rappelant que celle-ci n'était conditionnée que par l'existence de la dernière maladie au jour de la rédaction du testament et non par son diagnostic.
Cass. civ. 1re, 16 sept. 2020, n° 19-15.818 (V. annexe 2)
Don manuel - Restitution - Absence d'équivoque - À l'époque difficile du décès de son épouse, un père adoptif a procédé à d'importants paiements en faveur de son fils adoptif, avec lequel il était en relation conflictuelle, ainsi que de l'épouse de celui-ci. Ce père a ensuite cherché à obtenir la restitution des sommes payées, mais il n'a pu, devant le juge d'appel, renverser la présomption de don manuel dont bénéficiaient son fils et sa belle-fille. La Cour de cassation casse l'arrêt des juges du fond qui n'avaient pas, comme ils y avaient été invités, recherché si la possession dont se prévalait le détenteur des sommes n'était pas entachée d'équivoque. En effet, pour obtenir la restitution des sommes malgré la présomption de don manuel invoquée par leur possesseur, le demandeur doit rapporter la preuve de l'absence d'un tel don ou doit prouver que la possession dont se prévaut le détenteur ne réunit pas les conditions pour être efficace.
Cass. civ. 1re, 4 nov. 2020, n° 19-13.202 (V. annexe 3)
Libéralité - Intention libérale - Financement d'un achat immobilier - Droit d'usage - Dans le cadre d'un contentieux successoral, l'un des héritiers a demandé le rapport civil d'une donation déguisée qui aurait été consentie par le de cujus à l'un de ses enfants. Était en cause le financement partiel par le de cujus d'une acquisition immobilière réalisée en 1973 par cet enfant. Soulignant le fait que ce financement avait eu comme contrepartie l'occupation de l'immeuble acquis, par le de cujus, jusqu'à son départ en maison de retraite (période allant de 1973 à 2005), la Cour de cassation refuse de caractériser une intention libérale et rejette donc la qualification de libéralité retenue par les juges du fond. Sans renvoyer l'affaire à une autre cour d'appel, les juges du droit rejettent la demande de rapport successoral.
Cass. civ. 1re, 14 oct. 2020, n° 19-13.770 (V. annexe 4)
Assurance vie - Clause bénéficiaire - Désignation « mes héritiers » - Légataire à titre universel - Quelques années après avoir désigné, par testament, l'un de ses enfants et l'un de ses petits-enfants, légataires chacun de la moitié de la quotité disponible de sa succession, un contribuable a souscrit un contrat d'assurance vie et désigné comme bénéficiaires ses « héritiers ». À la suite du paiement du bénéfice de l'assurance vie par la compagnie d'assurance au profit de l'enfant et du petit enfant, légataires à titre universel du souscripteur, un autre enfant non légataire a contesté l'assimilation d'un légataire à titre universel comme héritier dans le cadre du dénouement du contrat d'assurance vie. Néanmoins, pour la Cour de cassation, les juges du fond interprétant souverainement la volonté du souscripteur d'assurance vie peuvent estimer que le terme « héritier » couvre également les légataires à titre particulier du souscripteur.
Cass. civ. 1re, 30 sept. 2020, n° 19-11.187 (V. annexe 5)
Succession - Date d'évaluation des libéralités pour la liquidation de la réserve (date du décès) - Date d'évaluation de l'indemnité de réduction (date du partage) - Les opérations de liquidation de la réserve héréditaire d'une succession avaient révélé une atteinte à la réserve de certains héritiers. Le notaire en charge de la liquidation et du partage de la succession ayant déterminé le montant de l'indemnité de réduction à partir de la valeur « décès » des biens donnés, l'héritier créancier de l'indemnité de réduction a contesté cette valeur et demandé que soit retenue la valeur des biens donnés à l'époque du partage. N'ayant pas obtenu gain de cause devant les juges d'appel, il se pourvoit en cassation. Les juges du droit cassent l'arrêt d'appel en rappelant que, si la valeur « décès » doit être retenue pour déterminer à quelle proportion des libéralités peuvent être réductibles, le calcul de l'indemnité de réduction doit être ensuite assis sur la valeur « partage » des biens donnés.
Cass. civ. 1re, 4 nov. 2020, n° 19-10.179 (V. annexe 6)
Succession - Démembrement de propriété - Quasi-usufruit - Créance de restitution - Décès du nu-propriétaire avant celui du quasi-usufruitier - À l'actif d'une succession dévolue au mari de la défunte à hauteur de 100 % en usufruit et à sa fille unique à hauteur de 100 % en nue-propriété, se trouvaient entre autres des comptes bancaires d'une valeur de l'ordre de 312 000 €. La créance de restitution afférente à ces actifs consomptibles démembrés n'ayant pas figuré dans la succession de la nue-propriétaire décédée avant son père usufruitier, les héritiers de la nue-propriétaire ont réclamé le paiement des sommes correspondantes aux héritiers de l'usufruitier. Confirmant en cela la position des juges d'appel qui n'ont pas suivi les défendeurs qui estimaient à tort que, dès lors que la nue-propriétaire était décédée avant l'usufruitier aucun droit d'usufruit ni aucune créance ne se retrouvait dans sa succession, la Cour de cassation rejette le pourvoi contre l'arrêt d'appel qui avait ordonné le paiement, par les héritiers de l'usufruitier, d'une créance de restitution de 312 000 € aux héritiers du nu-propriétaire.
Cass. civ. 1re, 4 nov. 2020, n° 19-14.421 (V. annexe 7)
Succession - Indivision successorale - Cession de droits indivis - Partage - Effet déclaratif - Des droits indivis portant sur un bien immobilier dépendant d'une indivision successorale ont fait l'objet de cessions entre indivisaires. Par la suite, le co-indivisaire cessionnaire des droits indivis est assigné en partage de l'indivision portant sur l'immeuble par un autre co-indivisaire. Cette demande est accueillie par les juges d'appel au motif que, dans l'acte de cession de droits indivis, les parties ont expressément entendu faire cesser l'indivision successorale entre elles sur les parts indivises cédées et n'ont pas prévu que l'effectivité des cessions soit soumise à l'aléa du partage de la succession. La Cour de cassation casse l'arrêt d'appel en jugeant, au visa de l'article 883 du code civil, que l'efficacité de la cession de leurs droits indivis, par certains indivisaires d'une indivision successorale, est subordonnée au résultat du partage.
Cass. civ. 1re, 4 nov. 2020, n° 19-13.267 (V. annexe 8)
Rapport parlementaire sur la philanthropie - Droit et fiscalité des successions et des libéralités - Un rapport parlementaire intitulé « La philanthropie à la française » comporte 35 propositions concernant notamment le droit et la fiscalité des successions et des libéralités.
S. El Haïry et N. Moutchou, Pour une philanthropie à la française, rapport parlementaire, juin 2020
Cession de compte courant d'associé - Preuve - Non-respect des formalités de l'article 1690 du code civil - Abandon de créance - Le TA de Nice juge, à propos de la cession de son compte courant par un associé, qu'une société est réputée établir qu'une créance d'un tiers n'a pas été éteinte mais transférée à un autre tiers dans le cas où ont été respectées les formalités prévues à l'article 1690 du code civil et que, dans le cas où ces formalités n'ont pas été accomplies, elle peut cependant démontrer par tout moyen de preuve la réalité du transfert de créance.
TA Nice, 3e ch., 12 juin 2020, n° 1805065, Eurl Ep Belview Investments (V. annexe 1)
Succession - Succession ayant une incidence transfrontière - Certificat d'hérédité - Résidence habituelle - La CJUE apporte des précisions sur l'application du règlement européen « succession », concernant les notions de succession ayant une incidence transfrontière et de résidence habituelle et la mise en œuvre de l'autonomie de la volonté pour le choix de loi et de juridiction.
CJUE, 1re ch., 16 juill. 2020, C-80/19, E. E. (IP 4-2020, n° 7, § 22)
Succession - Recel successoral - La Cour de cassation juge que l'article 792 du code civil, privant le successible coupable de divertissement ou de recel de sa part dans les effets divertis ou recelés, implique nécessairement l'existence d'une succession indivise, qui doit être partagée entre ce successible et d'autres ayants-droits.
Cass. civ. 1re, 2 sept. 2020, n° 19-15.955 (V. annexe 2)Succession - Masse partageable - La Cour de cassation rappelle que la masse partageable comprend les biens existant à l'ouverture de la succession, ou ceux qui leur ont été subrogés, et dont le défunt n'a pas disposé à cause de mort, ainsi que les fruits y afférents. Elle est augmentée des valeurs soumises à rapport ou à réduction, ainsi que des dettes des copartageants envers le défunt ou envers l'indivision. En l'espèce, la cour d'appel avait refusé l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession du défunt et de la communauté ayant existé entre ce dernier son épouse, au motif que les biens communs et les biens propres de l'époux ont été vendus avec le consentement nécessaire de tous les héritiers, que le prix en a été nécessairement réparti entre eux, de sorte qu'il n'y avait plus de biens à partager. La cour en a déduit que, par ce biais, ceux-ci ont opéré eux-mêmes la liquidation-partage de cette succession et de la communauté et que leur demande n'avait plus d'objet. L'arrêt est cassé faute d'avoir recherché si les héritiers avaient été remplis de leurs droits.
Cass. civ. 1re, 24 juin 2020, n° 19-10.510 (V. annexe 3)
Succession - Legs - Droit aux fruits du légataire - Titres de société - Droit aux dividendes - La Cour de cassation juge que selon l'article 1870, alinéa 1er du code civil, la société civile n'est pas dissoute par le décès d'un associé, mais continue avec ses héritiers ou légataires, sauf à prévoir dans les statuts qu'ils doivent être agréés par les associés. L'article 1870-1 du même code prévoit que les héritiers ou légataires qui ne deviennent pas associés n'ont droit qu'à la valeur des parts sociales de leur auteur. Il en résulte que, s'il n'est associé, l'héritier n'a pas qualité pour percevoir les dividendes, fût-ce avant la délivrance du legs de ces parts à un légataire.
Cass. civ. 1re, 2 sept. 2020, n° 19-14.604 (V. annexe 4)
Donations familiales de sommes d'argent - Droits de mutation à titre gratuit - Exonération temporaire sous condition d'affectation de sommes - La 3e loi de finances rectificative pour 2020 crée un nouveau régime d'exonération de droits de mutation à titre gratuit pour les personnes qui effectuent, dans un cadre familial, des donations de sommes d'argent en pleine propriété, sous condition d'affectation par le donataire des sommes reçues dans le financement de son entreprise, ou de travaux de rénovation énergétique, ou de construction de sa résidence principale (CGI, art. 790 A bis). Plafonnée à 100 000 € par donateur, cette exonération n'est ouverte que sur une période d'un an s'étendant entre le 15 juillet 2020 et le 30 juin 2021 et sous réserve du respect du droit des aides d'État.
L. n° 2020-935, 30 juill. 2020 de finances rectificative pour 2020 (3), art. 19 : JO 31 juill. 2020, texte n° 1 (V. annexe 5 ; texte et travaux parlementaires)
Droits de mutation à titre gratuit - Télédéclaration et télérèglement - Déclarations de succession, de dons manuels, de dons de sommes d'argent - Un décret précise la liste des déclarations concernées par la télédéclaration et le télérèglement obligatoires prévus par l'article 150 de la loi n° 2019-1479 de finances pour 2020 : il s'agit des déclarations de succession, de dons manuels et de dons de sommes d'argent (ainsi que de cession de droits sociaux pour les droit de mutation à titre onéreux). Un arrêté à venir, publié avant le 1er juillet 2025, fixera les modalités et la date d'entrée en vigueur de ces nouvelles règles.
D. n° 2020-772, 24 juin 2020 relatif à l'obligation de souscription et de paiement par voie dématérialisée en matière d'enregistrement : JO 25 juin 2020, texte n° 32 (V. annexe 6)
Partage judiciaire - Mandataire successoral - Acte de partage - Signature - Dans le cadre du partage judiciaire d'une communauté et de successions litigieuses, face au refus de l'un des co-partageants de signer l'acte de partage, une cour d'appel a désigné un mandataire successoral en lui confiant la mission de signer ledit acte. La Cour de cassation, après avoir rappelé que ce mandataire ne pouvait être missionné que pour exécuter des actes d'administration ou de disposition nécessaires à la bonne administration de la succession, juge qu'il ne peut être missionné pour consentir au partage, acte mettant fin à l'indivision.
Cass. civ. 1re, 13 mai 2020, n° 18-26.702 (V. annexe 1)
Succession - Rapport des libéralités - Preuve de la libéralité - Élément matériel - Élément intentionnel - La Cour de cassation censure les juges du fond dans deux affaires pour ne pas avoir caractérisé l'un des deux éléments constitutifs d'une libéralité : l'élément matériel dans la première, où était en cause un cautionnement par la mère d'obligations financières de sociétés dont un des fils était associé ; l'élément intentionnel dans la seconde, relative à un fonds de commerce appartenant au père mais exploité par l'un des fils qui l'avait vendu et a conservé le prix.
Cass. civ. 1re, 18 mars 2020, n° 18-25.309 (V. annexe 3)
Don manuel - Droits de mutation à titre gratuit - Révélation - La Cour de cassation juge, s'agissant d'une situation survenue après l'entrée en vigueur de l'article 9 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011, que la mention de dons manuels par courrier du donataire à l'administration fiscale, en réponse à des questions posées dans le cadre d'un examen de la situation fiscale personnelle de ce contribuable vaut révélation du don manuel au sens des articles 635 A et 757 du CGI. En conséquence, le don doit être déclaré (et les droits payés) par le donataire dans un délai d'un mois à compter de cette révélation.
Cass. com., 4 mars 2020, n° 18-11.120 (V. annexe 5)
Donation avec réversion d'usufruit - Usufruits successifs - Droits de mutation à titre gratuit - Prise en charge par le donateur - Restitution (CGI, art. 1965 B) - En cas de transmission à titre gratuit d'un bien pour lequel ont été prévus des usufruits successifs, les droits de mutation à titre gratuit (DMTG) dus par le nu-propriétaire sont calculés en référence à l'âge du premier usufruitier. Au décès de celui-ci, l'usufruit successif s'ouvre dès lors que l'usufruitier en second est vivant à cette date. En raison de l'écart d'âges pouvant exister entre les deux usufruitiers successifs, l'évaluation initiale de la nue-propriété retenue pour le calcul des DMTG peut ne plus correspondre à la réalité. Ainsi, le CGI ouvre au bénéficiaire de la transmission en nue-propriété un droit à restitution correspondant à l'écart de DMTG résultant du recalcul de ceux-ci en référence à l'âge du second usufruitier à l'époque de la transmission de la nue-propriété. Le ministre de la Justice précise, sous réserve de l'avis de la DGFiP, que, dans l'hypothèse d'une prise en charge des droits de mutation à titre gratuit par le donateur de la nue-propriété, ni sa succession, ni le donataire ne peuvent bénéficier de ce droit de restitution. Cette position mérite d'être confirmée par la DGFiP.
RM Duby-Muller, n° 26892 : JOAN 2 juin 2020, p. 3863 (V. annexe 6)
Succession - Réserve héréditaire - Rapport - Un rapport sur la réserve héréditaire a été remis au ministre de la justice le 13 décembre 2019. Sans revenir sur le principe de la réserve héréditaire des descendants, le rapport propose plusieurs ajustements du cadre juridique de cette institution. Il est notamment proposé d'abaisser l'assiette maximale de la réserve à 2/3 de la masse successorale, d'intégrer certains contrats d'assurance vie dans son calcul, d'inclure le respect de la réserve héréditaire dans l'ordre public international français, de faire évoluer la renonciation anticipée à l'action en réduction des libéralités excédant la quotité disponible vers un véritable pacte de famille et de supprimer la réserve héréditaire du conjoint survivant.
Rapport sur la réserve héréditaire, 13 déc. 2019 (et annexes au rapport)
Donation - Interdiction d'aliéner - Promesse de vente - En 2007, le propriétaire d'une parcelle avait consenti une promesse de vente portant sur un terrain, mais celle-ci n'avait pu faire l'objet d'une réitération par acte authentique tant que subsistaient les charges pesant sur ce bien (une interdiction d'aliéner et d'hypothéquer liée au droit de retour de ses parents). En 2014, après le décès de ses parents, comme le promettant n'a finalement pas régularisé la promesse, mais a donné son bien à un tiers, le bénéficiaire de la promesse a demandé l'annulation de la donation passée en violation de ses droits. La Cour de cassation confirme l'arrêt d'appel ayant annulé la donation et souligne, s'agissant de la promesse, l'absence de condition lui faisant encourir la caducité, l'absence de dénonciation par les parties et l'absence de délai convenu pour la réitération par acte authentique.
Cass. civ. 3e, 30 janv. 2020, n° 18-25.381 (V. annexe 1)
Succession - Rapport des dettes - Charge de la preuve - Dans un partage successoral, l'un des copartageants avait reconnu que le défunt lui avait prêté une somme d'argent plusieurs années auparavant. En réaction, les autres copartageants ont exigé qu'il fasse le rapport de sa dette (ce qui implique l'allotissement de la créance en faveur du débiteur copartageant et conduit à l'extinction de la dette par confusion). Le copartageant débiteur, estimant qu'il appartenait aux autres copartageants d'apporter la preuve de l'existence de sa dette, s'est opposé sans succès à son rapport devant les juges d'appel. Dans un arrêt didactique, la Cour de cassation rejette son pourvoi en considérant que l'existence de la dette ayant été apportée (puisque l'auteur du pourvoi ne conteste pas avoir bénéficié d'un prêt de la part du défunt), c'était dès lors au copartageant débiteur de prouver qu'il avait d'ores et déjà remboursé cette dette.
Cass. civ. 1re, 12 févr. 2020, n° 18-23.573 (V. annexe 2)
Succession - Acceptation - Succession ouverte avant le 1er janvier 2007 - Prescription - L'enfant d'un premier lit d'un défunt disparu en 1999, qui n'avait pas été mis au courant du règlement de la succession de son auteur, a souhaité accepter celle-ci après le 19 juin 2013. La Cour d'appel rejeta sa demande qu'elle considéra comme prescrite depuis l'écoulement d'un délai de 5 ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile. La Cour de cassation casse l'arrêt d'appel en soulevant un moyen d'office. Elle souligne que le délai de prescription applicable en matière d'acceptation successorale était celui de la prescription la plus longue des droits immobiliers, soit 30 ans. La loi du 17 juin 2008 n'ayant pas modifié la durée de ce délai, celui-ci continue d'être applicable aux successions ouvertes avant le 1er janvier 2007.
Cass. civ. 1re, 12 févr. 2020, n° 19-11.668 (V. annexe 3)
Succession - Renonciation - Fraude - Action paulienne - La Cour de cassation donne son plein effet à une action paulienne exercée par un liquidateur judiciaire visant à ce que la renonciation frauduleuse à une succession lui soit inopposable.
Cass. civ. 1re, 22 janv. 2020, n° 19-12.492 (V. annexe 4)
Droits de mutation à titre gratuit - Dons manuels et successions - Télédéclaration - Un décret, pris en application du XVI de l'article 1649 quater B quater du CGI issu de l'article 150 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, vient ajouter à la déclaration « papier » une nouvelle possibilité de satisfaire aux obligations déclaratives via un téléservice. Cependant, celui-ci n'est pas encore mis à disposition des contribuables à ce jour.
D. n° 2019-1565, 30 déc. 2019 relatif aux modalités de déclaration en matière d'enregistrement : JO 31 déc. 2019, texte n° 160 (V. annexe 5)
Succession - Liquidation de la réserve héréditaire - Donation d'une somme d'argent - Démembrement de propriété - La Cour de cassation juge qu'en cas de donation d'une somme d'argent employée ensuite dans l'acquisition de la nue-propriété d'un bien immobilier, tandis que l'usufruit était acquis par le parent donateur, la valeur de réunion fictive devant être retenue pour la liquidation de la réserve héréditaire dans le cadre de la succession du donateur n'est pas la valeur nominale des sommes données. Il convient de retenir la valeur du bien acquis au moyen des sommes, suivant l'évaluation de celui-ci au jour de l'ouverture de la succession et d'après son état à l'époque de son acquisition.
Cass. civ. 1re, 17 oct. 2019, n° 18-22.810 (V. annexe 1)
Succession - Nomination d'un mandataire successoral - Légataire universel - Immeuble en copropriété - La Cour de cassation juge que la nomination d'un mandataire successorale n'est pas réservée aux successions indivises, mais a vocation à s'appliquer à toute succession et qu'en présence d'un légataire universel, qui n'est pas en indivision avec les autres héritiers réservataires, la mauvaise gestion et la diminution du patrimoine successoral compromettent leur intérêt commun. En l'espèce, les juges valident la demande de nomination émanant du syndicat des copropriétaires d'un immeuble figurant dans la succession, en raison de charges impayées.
Cass. civ. 1re, 17 oct. 2019, n° 18-23.409 (V. annexe 2)
Succession - Indivision successorale - Sursis au partage - La Cour de cassation juge qu'à la demande d'un indivisaire, un tribunal peut surseoir au partage pour deux années au plus, notamment si sa réalisation immédiate risque de porter atteinte à la valeur des biens indivis ; lorsque le partage résulte d'une décision de justice irrévocable, il ne peut plus être sursis à la licitation, laquelle constitue une modalité du partage.
Cass. civ. 1re, 3 oct. 2019, n° 18-21.200 (V. annexe 3)
Succession - Rapport des libéralités - Action en partage judiciaire - Partage amiable - Recel successoral - La Cour de cassation juge que les demandes en rapport d'une libéralité dont aurait bénéficié un héritier et en application de la sanction du recel successoral ne peuvent être formées qu'à l'occasion d'une action en partage judiciaire. Une telle action ne peut plus être engagée lorsque les parties, ayant déjà procédé au partage amiable de la succession, ne sont plus en indivision.
Cass. civ. 1re, 6 nov. 2019, n° 18-24.332 (V. annexe 4)
Succession - Saisine - Transmission d'une action en justice - La Cour de cassation juge, à propos d'une donation à une association, que l'action en nullité relative de l'acte que l'article 1427 du code civil ouvre au conjoint de l'époux qui a outrepassé ses pouvoirs sur les biens communs, est, en raison de son caractère patrimonial, transmise, après son décès, à ses ayants cause universels.
Cass. civ. 1re, 6 nov. 2019, n° 18-23.913 (V. annexe 5)
Succession - Réserve héréditaire - Action en réduction - La Cour de cassation se montre une nouvelle fois peu formaliste pour considérer qu'une action en réduction a été exercée par un héritier.
Cass. civ. 1re, 3 oct. 2019, n° 18-19.783 (V. annexe 6)
Succession - Droits de mutation à titre gratuit - Actif taxable - Valeurs mobilières dont la cotation est suspendue - Évaluation - Dans une affaire où, à la date du fait générateur des droits de succession, le titre Eurotunnel faisait l'objet d'une suspension de cotation, la Cour de cassation considère qu'aucune des deux méthodes prévues par l'article 759 du CGI n'était, par principe, applicable. Elle juge cependant qu'eu égard aux faits de l'espèce, les juges d'appel ont pu souverainement évaluer ces titres par référence à la moyenne des trente derniers cours ayant précédé la suspension de la cotation.
Cass. com., 6 nov. 2019, n° 18-12.303 (V. annexe 7)
Succession - Tarif - Représentation - La Cour de cassation rappelle la non-application des droits de succession prévus entre frère et sœur dans l'hypothèse où l'unique sœur du défunt ayant renoncé à la succession, l'un de ses deux propres enfants vint à la succession, ainsi que les deux enfants de son autre enfant. Dans une telle situation, les héritiers, neveux et petits-neveux du défunt, ne viennent pas à la succession en représentation de leur mère ou grand-mère, sœur unique du défunt, puisque la représentation est exclue en cas d'unicité de souche.
Cass. civ. 1re, 3 oct. 2019, n° 18-18.737 (V. annexe 8)
Donation-partage - Irrévocabilité spéciale des donations - Titres sociaux - Modifications statutaires - La Cour de cassation juge que l'utilisation d'une technique sociétaire ne remet pas nécessairement en cause l'irrévocabilité d'une donation-partage.
Cass. com., 7 mai 2019, n° 17-14.438 (V. annexe 1)
Donation déguisée - Rapport successoral - Calcul du montant de l'indemnité - Dans le contexte d'une donation déguisée (vente réalisée à moindre prix), la Cour de cassation rappelle que le rapport n'est dû que pour l'avantage conféré par la libéralité (et non pour l'intégralité de la valeur réelle du bien).
Cass. civ. 1re, 11 juill. 2019, n° 18-19.415 (V. annexe 2)
Assurance vie - Substitution de bénéficiaire - La Cour de cassation juge que la substitution de bénéficiaire d'un contrat d'assurance vie nécessite le respect du formalisme prévu par l'article L. 132-8, alinéa 2 du code des assurances.
Cass. civ. 1re, 13 juin 2019, n° 18-14.954 (IP 3-2019, n° 2.3, comm. A. Olivier)
Succession - Indivision successorale - Attribution préférentielle - Renonciation - La Cour de cassation juge que lorsque la renonciation à l'attribution préférentielle intervient par une décision judiciaire, elle est libre tant que la décision n'est pas passée en force de chose jugée. Une fois passée en force de chose jugée, elle devient possible uniquement si les conditions de l'article 834, alinéa 2 du code civil sont réunies.
Cass. civ. 1re, 29 mai 2019, n° 18-18.823 (V. annexe 3)
Succession - Exploitation agricole - Salaire différé du descendant - Conjoint - La Cour de cassation juge que le conjoint du descendant d'un exploitant agricole ne peut prétendre à une créance de salaire différé que s'il a travaillé sur l'exploitation concomitamment avec ce descendant. À défaut, l'action fondée sur l'enrichissement sans cause est ouverte, et soumise à la prescription de droit commun.
Cass. civ. 1re, 29 mai 2019, n° 18-18.376 (V. annexe 4)
Succession - Adoption frauduleuse - La Cour de cassation valide l'annulation de l'adoption de deux sœurs jumelles d'origine étrangère par le de cujus, en soulignant un détournement de l'institution de l'adoption utilisée ici à des fins successorales et fiscales. La Cour juge que la fraude du de cujus consistait à avoir dissimulé aux juges certaines informations lors de la demande d'adoption.
Cass. civ. 1re, 13 juin 2019, n° 18-19.100 (V. annexe 5)
Succession internationale - Certificat d'hérédité - La CJUE juge qu'un certificat d'hérédité s'analyse en un acte notarié au sens du règlement du 4 juillet 2012.
CJUE, 23 mai 2019, C-658/17, WB (IP 2-2019, n° 7, § 26)
Transmission à titre gratuit - Abus de droit fiscal - Après avoir rassuré les praticiens par le biais d'un communiqué de presse le 19 janvier dernier (IP 1-2019, n° 5, § 49), l'administration indique, s'agissant des donations en nue-propriété, que ces opérations ne sont pas concernées par le nouvel abus de droit fiscal prévu à l'article L. 64 A du LPF. Mais, comme auparavant, leur remise en cause peut résulter de la démonstration de la fictivité de l'opération.
RM Procaccia, n° 09965 : JO Sénat 13 juin 2019, p. 3070 (V. annexe 5)
Donation avec réserve d'usufruit - Protection du logement de la famille - La Cour de cassation juge qu'un conjoint marié peut procéder, seul et sans l'accord de l'autre conjoint, à la donation de la nue-propriété de l'immeuble constituant le logement de la famille en stipulant une réserve d'usufruit à son seul profit. En effet, une telle opération ne porte aucunement atteinte à la jouissance du logement familial par les époux pendant le mariage.
Cass. civ. 1re, 22 mai 2019, n° 18-16.666 (V. annexe 1)
Apport de la partie de l'exploitation agricole réservée à l'habitation à une société civile - Procédure collective - La Cour de cassation juge que le conjoint survivant ne peut bénéficier du droit viager d'habitation et d'usage prévu à l'article 764 du code civil portant sur un bien dont l'époux décédé était dessaisi par l'effet d'une procédure de liquidation judiciaire le concernant à la date de son décès. Cette décision invite à s'interroger sur la manière de protéger la partie de l'exploitation agricole réservée à l'habitation.
Cass. civ. 1re, 30 janv. 2019, n° 18-10.002 (V. annexe 2)
Abandon d'usufruit au profit d'une personne morale - Donation indirecte - La Cour de cassation confirme l'arrêt d'appel qui a qualifié de donation indirecte l'abandon de son droit par l'usufruitier de parts sociales au profit d'une société dont ses enfants sont les principaux associés, dès lors que les critères de la libéralité (appauvrissement du donateur, enrichissement corrélatif du donataire et intention libérale) ont été appréciés par les juges du fond entre l'usufruitier et la personne morale (et les enfants de l'usufruitier associés).
Cass. com., 10 avr. 2019, n° 17-19.734 (V. annexe 3)
Assurance vie - Modification du bénéficiaire - Testament - La Cour de cassation confirme que la modification des bénéficiaires d'un contrat d'assurance vie peut intervenir soit par voie d'avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l'article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire, sans qu'il soit nécessaire de respecter un parallélisme des formes entre la voie choisie pour la désignation initiale et celle retenue pour la modification.
Cass. civ. 1re, 3 avr. 2019, n° 18-14.640 (V. annexe 4)
Succession - Inventaire des meubles - Héritiers usufruitiers - La Cour de cassation juge que les héritiers en nue-propriété d'une collection d'œuvre d'art ont le droit d'exiger que soit dressé, en leur présence, l'inventaire de ces biens soumis à l'usufruit du conjoint survivant, et ce nonobstant toute stipulation contraire du disposant. Leur demande d'inventaire ne peut donc être rejetée au motif que le notaire en charge de la succession l'aurait déjà entrepris.
Cass. civ. 1re, 6 mars 2019, n° 18-11.640, n° 18-11.936 (V. annexe 5)
Succession - Rapport des libéralités - Dons manuels aux petits-enfants - La Cour de cassation juge que lorsqu'une personne réalise des dons manuels au profit de deux de ses enfants et, pour le troisième, gratifie directement les enfants de ce dernier, les libéralités faites aux petits-enfants n'ont pas être rapportées à la succession du donateur. La circonstance que le défunt ait, malgré la transmission à deux petits-enfants, voulu gratifier au départ ses trois enfants, ne permet pas de s'écarter de l'application de l'article 847 du code civil.
Cass. civ. 1re, 6 mars 2019, n° 18-13.236 (V. annexe 6)
Succession - Rapport et réduction des libéralités - Communauté universelle avec clause d'attribution intégrale au conjoint survivant - La Cour de cassation juge que, malgré l'attribution intégrale de la communauté universelle au conjoint survivant à la suite du décès d'un donateur, un héritier réservataire peut prétendre au rapport et à la réduction de libéralités qui, consenties par le défunt avant le changement de régime matrimonial, avaient pour objet un bien qui n'était pas entré en communauté.
Cass. civ. 1re, 3 avr. 2019, n° 18-13.890 (V. annexe 7)
Succession - Artiste - Usufruit spécial du conjoint survivant - La Cour de cassation juge que le droit d'usufruit spécial dont le conjoint survivant est titulaire en vertu des règles du droit de la propriété littéraire et artistique ne s'étend pas aux exemplaires originaux.
Cass. civ. 1re, 22 mai 2019, n° 17-28.314 (V. annexe 9)
Succession internationale - Loi applicable - Compétence juridictionnelle - La Cour de cassation juge que selon l'article 10, § 2 du règlement UE n° 650/2012, lorsque la résidence habituelle du défunt au moment du décès n'est pas située dans un État membre et qu'aucune juridiction d'un État membre n'est compétente en vertu du paragraphe 1, les juridictions de l'État membre dans lequel sont situés des biens successoraux sont néanmoins compétentes pour statuer sur ces biens.
Cass. civ. 1re, 29 mai 2019, n° 18-13.383 (IP 2-2019, n° 7, § 22)
Succession - Droits de mutation à titre gratuit - Abattements prévus pour les frères et sœurs - Legs aux neveux et nièces - Représentation - La Cour de cassation juge que les dispositions fiscales relatives au calcul des droits de succession dus en ligne collatérale par les frères et sœurs ne s'appliquent à leurs représentants que s'ils viennent à la succession par l'effet de la dévolution légale et non dans l'hypothèse où ils sont, comme en l'espèce, légataires du défunt.
Cass. civ. 1re, 17 avr. 2019, n° 17-11.508 (V. annexe 11)
Communauté universelle - Clause d'attribution intégrale - Passif - La Cour de cassation juge que la clause d'attribution intégrale de la communauté fait supporter au conjoint le passif, même celui né du chef de son époux décédé, sauf si la dette a été contractée dans l'intérêt exclusif de l'époux.
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Juridiction : Cass.
Formation de jugement : Civ. 1re
Date : 5 déc. 2018
Num décision : 16-13.323
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Cass. civ. 1re, 5 déc. 2018, n° 16-13.323 (V. annexe 1)
Donation - Révocation pour violation d'une charge de conservation - Revente d'une œuvre d'art - Au visa des règles de révocation des libéralités pour inexécution des charges, la Cour de cassation casse l'arrêt d'une cour d'appel qui avait jugé que le conjoint survivant d'un artiste donataire d'œuvres d'art avec charge de non-revente des œuvres n'avait pas qualité à agir pour demander la révocation de la donation pour inexécution des charges puisque le droit moral sur ces œuvres avait été reçu par les enfants de l'artiste.
Cass. civ. 1re, 16 janv. 2019, n° 18-10.603 (V. annexe 2)
Donation - Révocation pour ingratitude - Mise en œuvre - La Cour de cassation juge que la révocation d'un acte de donation pour ingratitude ne peut être prononcée que pour des faits commis à l'encontre du donateur, et non à l'encontre d'une société qu'il a créée.
Cass. civ. 1re, 30 janv. 2019, n° 18-10.091 (V. annexe 3)
Donation-partage - Actes séparés - Opposabilité - La Cour de cassation juge, dans le cadre d'une donation-partage réalisée par actes de donation et de partage séparés, que le refus de certains donataires de signer l'acte de partage n'affecte pas la validité ni l'opposabilité de la donation-partage dès lors qu'un des enfants a valablement accepté son lot.
Cass. civ. 1re, 13 févr. 2019, n° 18-11.642 (V. annexe 4)
Testament-partage - Biens communs - Biens propres du conjoint - Nullité - La Cour de cassation juge que s'il est possible de prévoir, par voie de testament, le partage anticipé des biens composant sa succession, cette faculté ne s'étend pas aux biens communs, ni aux propres de l'autre époux.
Cass. civ. 1re, 5 déc. 2018, n° 17-17.493 (V. annexe 5)
Certificat successoral européen - Formalisme - Formulaire IV - La CJUE juge que pour demander un certificat successoral européen, le formulaire IV de l'annexe 4 du règlement d'exécution du 9 décembre 2014 n'a pas un caractère obligatoire.
##Métachron
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Juridiction : CJUE
Formation de jugement : 6e ch.
Date : 17 janv. 2019
Num décision : C-102/18
Parties : Brisch
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CJUE., 6e ch., 17 janv. 2019, C-102/18, Brisch (V. annexe 6)
Succession - Acceptation - Acceptation à concurrence de l'actif net - Déclaration de créances - La Cour de cassation juge qu'en cas d'acceptation d'une succession à concurrence de l'actif net, les créanciers ne peuvent se soustraire à leur obligation de déclaration en rapportant la preuve que les héritiers étaient informés de leur créance.
Cass. civ. 1re, 16 janv. 2019, n° 18-11.916 (V. annexe 7)
Succession - Rapport successoral - Réduction des libéralités - La Cour de cassation se prononce sur l'articulation des opérations de liquidation de la réserve héréditaire et de partage de la succession en présence d'une donation prévoyant un rapport figé à la valeur des biens à l'époque de la donation.
Cass. civ. 1re, 5 déc. 2018, n° 17-27.982 (V. annexe 8)
Succession - Droit viager au logement du conjoint survivant - Possibilité d'option tacite - La Cour de cassation juge que la manifestation tacite de la volonté du conjoint de bénéficier de son droit viager au logement peut résulter de la somme des éléments suivants : maintien dans les lieux, déclaration du souhait de conserver l'appartement « conformément à la loi » dans une assignation délivrée à un cohéritier, et confirmation du souhait de bénéficier du droit viager au logement dans un projet d'acte de notoriété.
Cass. civ. 1re, 13 févr. 2019, n° 18-10.171 (V. annexe 9)
Succession - Conjoint survivant en état de besoin - Pension - La Cour de cassation rappelle que le caractère « non mobilisable » des actifs successoraux (en l'espèce des droits sur un immeuble) ne permet pas d'écarter le droit à pension dû par la succession au conjoint survivant qui est dans le besoin.
Cass. civ. 1re, 30 janv. 2019, n° 18-13.526 (V. annexe 10)
Donation - Démembrement de propriété - Abus de droit fiscal - En réponse aux inquiétudes exprimées à la suite de l'adoption du nouvel article L. 64 A du LPF, au sujet de l'éventuelle remise en cause généralisée des opérations de donation avec réserve d'usufruit, le Ministre de l'Action et de Comptes Publics annonce que la nouvelle définition de l'abus de droit fiscal ne remettra pas en cause ces opérations dès lors qu'elles ne sont pas fictives.
MACP, communiqué n° 568, 19 janv. 2019
Donation indirecte - Assurance vie - Co-adhésion - L'administration fiscale estime que la qualification de donation indirecte d'une co-adhésion à un contrat d'assurance vie par deux époux communs en biens avec dénouement au second décès résulte d'une appréciation au cas par cas au vu des circonstances de fait de l'espèce. Rien ne l'exclut a priori.
RM Malhuret, n° 00256 : JO Sénat 10 janv. 2019 (V. annexe 11)