Ilan Khayat est lauréat du concours national de création d’office en 2015, chargé de travaux dirigés en droit des successions à l’université de Paris, et membre du réseau Notissim.
Ilan KHAYAT
Notaire à Croissy-sur-Seine
Notaire à Croissy-sur-Seine
Ilan Khayat est lauréat du concours national de création d’office en 2015, chargé de travaux dirigés en droit des successions à l’université de Paris, et membre du réseau Notissim.
Divorce - Liquidation de la communauté - Récompenses - Plus-value sur un bien propre trouvant sa source dans des faits partiellement générateurs de récompense - Évaluation de la récompense - Dans une affaire où la plus-value dégagée sur le bien propre de l'époux provenait pour partie de son activité personnelle, mais aussi du remboursement partiel par des deniers communs, depuis sa souscription jusqu'à la date des effets du divorce, d'un emprunt contracté par l'époux pour l'achat des matériaux nécessaires à la réalisation des travaux d'amélioration, la Cour de cassation : 1° confirme que la plus-value générée par l'activité de l'époux sur un bien propre ne donne pas lieu à récompense ; 2° détaille la méthode de calcul de la récompense : lorsqu'une partie des travaux a été réalisée par l'époux propriétaire du bien, il convient de procéder à un calcul fondé sur les valeurs suivantes : A, la valeur du bien au jour de la liquidation ; B, la valeur qu'aurait eue le bien au jour de la liquidation, sans les travaux réalisés ; C, le montant des dépenses assumées par la communauté, correspondant, s'agissant du remboursement d'échéances d'emprunts souscrits pour financer des travaux relatifs à un bien propre, au seul capital remboursé par la communauté ; et D, le coût total qu'auraient eu les travaux à l'époque de leur réalisation, matériaux et main d'œuvre compris, s'ils n'avaient pas été réalisés par l'époux ou des tiers non rémunérés ; la récompense est alors égale à la part de la plus-value apportée au bien par les travaux réalisés découlant du financement assumé par la communauté, soit (A-B) x C/D.
Cass. civ. 1re, 23 mai 2024, n° 22-18.911, F-D (V. annexe 4)
Divorce - Dissolution de la c ommunauté entre époux - Droit de reprise des b iens propres ( C. civ., art. 1467) - Somme d'argent - La Cour de cassation juge qu'aux termes de l'article 1467, alinéa 1er du code civil, la communauté dissoute, chacun des époux reprend ceux des biens qui n'étaient point entrés en communauté, s'ils existent en nature, ou les biens qui y ont été subrogés. Il en résulte que, saisie d'une demande de reprise de sommes d'argent, une juridiction doit vérifier que celles-ci existaient encore et étaient restées propres à l'époux demandeur à la date de la dissolution de la communauté.
Cass. civ. 1re, 2 mai 2024, n° 22-15.238, F-B (V. annexe 2)
Communauté - Recel d'effets de la communauté - Droits sociaux - Immatriculation de la société postérieurement à la dissolution de la communauté - La Cour de cassation rappelle que les sociétés commerciales jouissent de la personnalité morale à compter de leur immatriculation au registre du commerce, et que c'est à cette date que naissent les droits sociaux. Elle juge qu'en conséquence, ne constituent pas un effet de la communauté, pour l'application de l'article 1842 du code civil, les droits sociaux résultant de l'immatriculation d'une société intervenue postérieurement à la dissolution de la communauté, même si les statuts de la société ont été signés et l'apport au capital libéré avant ladite dissolution.
Cass. civ. 1re, 17 janv. 2024, n° 22-11.303, F-B (V. annexe 4)
Régime matrimonial - Communauté - 1° Bien dont l'un des époux était nu-propriétaire en propre - 2° Options de souscription ou d'achat d'actions (stock-options) -À l'occasion d'un contentieux faisant suite à une procédure de divorce, la Cour de cassation : 1° se prononce sur le calcul d'une récompense due par l'un des époux à la communauté au titre du financement par cette dernière de travaux d'amélioration portant sur un bien dont l'un des époux était nu-propriétaire en propre et sur lequel, à la date de la dissolution du régime matrimonial, l'usufruit s'était d'ores et déjà éteint ; la Cour juge que le profit subsistant correspond à la différence entre la valeur de la propriété de l'immeuble et celle qui aurait été la sienne sans les travaux financés par la communauté ; elle censure donc l'arrêt d'appel ayant calculé le profit subsistant à partir de la valeur de la nue-propriété de l'immeuble ; 2° rappelle la qualification à retenir pour les options de souscription ou d'achat d'actions (stock-options) reçues en cours d'union et les actions issues de l'exercice de telles options reçues en cours d'union, pour la liquidation du régime matrimonial. Ainsi, les options non levées à la date de dissolution de la communauté forment des propres par nature pour leur attributaire, tandis que les actions issues de levées d'options antérieures à la dissolution forment des acquêts enrichissant la communauté conjugale. Des aménagements contractuels apparaissent toutefois envisageables.
Cass. civ. 1re, 25 oct. 2023, n° 21-23.139, FS-B (V. annexe 1)
Divorce - Prestation compensatoire - V ersement échelonné - F ix ation par le juge du montant des versements mensuels - Si une prestation compensatoire de divorce doit, en principe, prendre la forme d'un versement d'un capital en une fois, le juge peut prévoir, en fonction des situations, des versements échelonnés de ce capital sur une période qui ne peut excéder 8 ans. Dans l'affaire jugée, le créancier de la prestation compensatoire à versements mensuels échelonnés sur une période de 4 années reprochait à l'arrêt d'appel de ne pas avoir fixé de montant minimal de versement mensuel. La Cour de cassation la suit dans son argumentation et censure en conséquence l'arrêt des juges du fond.
Cass. civ. 1re, 1er juin 2023, n° 21-22.951, F-B (V. annexe 2)
#Mots-clés: Régime matrimonial, contrat de mariage, convention matrimoniale, séparation de biens, contribution aux charges du mariage, obligation, logement, famille, immeuble
#Article du code civil: 214
#Auteur: Ilan¤ KHAYAT
#Qualités: Notaire à Croissy-sur-Seine
#Qualités: Membre du groupe notarial Les Artisans Notaires
Quand le financement d’un bien immobilier entre époux séparés de biens concerne l’achat ou l’amélioration d’un logement à l’usage de la famille (V. § 1), les voies de recours habituelles en cas de surfinancement ou de paiement de la dette d’autrui, peuvent se voir contrariées par le régime des charges du mariage (V. § 2). Ce n’est que par une ingénierie patrimoniale sophistiquée que le conseil et le rédacteur d’acte pourront « domestiquer » les charges du mariage, par un aménagement pertinent des modes de paiement de l’obligation (V. § 5 à 15) et des règles de preuve (V. § 16 à 21) dans le contrat de mariage, ou bien encore privilégier la définition des quotités de contribution hors convention matrimoniale (V. § 23). La jurisprudence sur la faculté qu’auraient les époux d’inclure hors convention matrimoniale certaines dépenses non constitutives de charges par nature dans la participation à « l’exécution de l’obligation de contribution » s’avérerait, après analyse, décevante (V. § 26).
Divorce - Liquidation de la communauté légale - Droit à récompense - Sommes versées directement au promoteur immobilier et au notaire par des parents pour financer l'achat immobilier en communauté de leur enfant - Des parents participèrent financièrement à l'acquisition de biens immobiliers constituant des actifs dépendant de la communauté conjugale de leur enfant. Dans le cadre de son divorce, ledit enfant exigea le paiement d'une récompense au titre de l'engagement des fonds acquittés par ses parents qui constituaient selon lui des propres dont la communauté aurait tiré profit. Les juges d'appel rejetèrent sa demande en considérant qu'en l'absence d'encaissement desdits fonds sur le compte indivis des époux (les paiements des parents ayant été réalisés directement au profit du notaire et du promoteur immobilier), il n'y aurait pas lieu à récompense, puisqu'une masse extérieure au couple aurait enrichi la communauté. La Cour de cassation censure cette position en invitant les juges du fond à rechercher si les sommes payées par les parents l'avaient été à titre de donation, constitutives de biens propres pour leur enfant, de sorte qu'elles fonderaient un droit à récompense à son profit.
Cass. civ. 1re, 11 mai 2023, n° 21-19.381, F-D (V. annexe 5)
#Auteur: Ilan¤ KHAYAT
#Qualités: Notaire à Croissy-sur-Seine
#Qualités: Membre du groupe notarial Les Artisans Notaires
Il n’est pas rare qu’un disposant, cherchant à anticiper au mieux la transmission de son patrimoine, multiplie les actes de disposition, associant dispositions de son vivant et dispositions de dernières volontés, pouvant occasionner une superposition de règles liquidatives spécifiques. Le conseil, sollicité pour l’anticipation, ou le liquidateur, saisi pour le règlement de la succession, doivent veiller au respect de ces dispositifs, dans un souci permanent de préservation de l’intégrité de la réserve. À l’aide d’un cas pratique chiffré, nous exposons en quoi ce contrôle de l’atteinte à la réserve suppose une articulation de la méthode de prélèvement réservataire avec les règles de combinaison de quotités (V. § 3), avant de proposer des aménagements de clauses pour une meilleure pratique de l’institution contractuelle et harmonisation des libéralités face à la réductibilité (V. § 35).
Régimes matrimoniaux - Communauté - Condamnation d'un époux en recel successoral - Saisie d'un bien commun - Dans le cadre de la condamnation d'un époux marié en régime de communauté pour recel successoral, son cohéritier bénéficia d'une inscription d'hypothèque sur un immeuble dépendant de la communauté conjugale de cet époux. Ce dernier conteste l'arrêt d'appel ayant admis que le paiement des sommes dues par lui au titre du recel successoral ait pu être poursuivi sur ce bien commun étant donné que le paiement des dettes successorales nées en cours d'union ne peut être poursuivi que sur les biens propres et les revenus de l'époux concerné. La Cour de cassation, bien que cassant l'arrêt d'appel pour un autre motif, rejette cette argumentation en jugeant que le paiement de sommes dues au titre d'une condamnation pour recel successoral, de nature délictuelle, ne constituait pas une dette grevant une succession et pouvait donc être poursuivi sur les biens communs.
Cass. civ. 2e, 8 déc. 2022, n° 20-14.302 (V. annexe 1)
Divorce - Prestation compensatoire - Calcul - Absence de prise en compte des mesures provisoires - Pension fondée sur le devoir de secours des époux - La Cour de cassation rappelle un principe déjà tranché en jurisprudence : dans le cadre d'un divorce, les mesures provisoires13 ordonnées par le juge de la mise en état lors de l'audience d'orientation et sur les mesures provisoires (AOMP)14, dont les effets se déploient de l'introduction de la demande en divorce jusqu'à la date à laquelle le jugement passe en force de chose jugée15, ne doivent pas être prises en compte pour la détermination de la prestation compensatoire à devoir par l'époux débiteur.
Cass. civ. 1re, 12 oct. 2022, n° 20-20.335, F-D (V. annexe 3)
Régime matrimonial - Séparation de biens - Apport en capital d'un époux en vue du financement de l'amélioration, par voie de construction, d'un bien indivis affecté à l'usage familial - Exécution de l'obligation de contribuer aux charges du mariage (non) - La Cour de cassation juge qu'il résulte de l'article 214 du code civil que, sauf convention contraire des époux, l'apport en capital de fonds personnels, effectué par un époux séparé de biens pour financer l'amélioration, par voie de construction, d'un bien indivis affecté à l'usage familial, ne participe pas de l'exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage.
Cass. civ. 1re, 9 juin 2022, n° 20-21.277 (V. annexe 1)
Divorce - Prestation compensatoire - Appréciation de l'existence d'une disparité créée par le divorce dans les conditions de vie respectives des époux - Éléments à prendre en compte - Jouissance gratuite de l'ancien domicile conjugal par l'un des époux au titre du devoir de secours (non) - Dans le cadre du règlement d'un divorce, l'ordonnance de non-conciliation octroya à l'épouse, au titre du devoir de secours entre époux, un droit à la jouissance gratuite de l'ancien domicile conjugal. Le juge du divorce rejeta par la suite la demande de prestation compensatoire de l'épouse en prenant en considération cette jouissance gratuite pendant une période de 7 ans. La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel pour avoir pris en considération l'avantage constitué par la jouissance gratuite du domicile conjugal accordée à l'épouse au titre du devoir de secours, pour apprécier l'existence d'une disparité créée par le divorce dans les conditions de vie respectives des époux.
Cass. civ. 1re, 13 avr. 2022, n° 20-22.807 (V. annexe 3)
Divorce - Liquidation et partage du régime matrimonial - Régime de la prescription des créances entre époux - La Cour de cassation juge : 1° qu'il résulte des articles 815, 1479, alinéa 1er, 1543 et 2224 du code civil que les créances qu'un époux séparé de biens peut faire valoir contre l'autre et dont le règlement ne constitue pas une opération de partage se prescrivent, en matière personnelle ou mobilière et en l'absence de disposition particulière, selon le délai de droit commun édicté par l'article 2224 du code civil ; 2° qu'il résulte de la combinaison des articles 2224 et 2236 du code civil que le délai de droit commun par lequel se prescrivent, en l'absence de dispositions particulières, les créances entre époux en matière personnelle ou mobilière commence à courir lorsque le divorce a acquis force de chose jugée.
Cass. civ. 1re, 18 mai 2022, n° 20-20.725 (V. annexe 4)
Régime matrimonial - Communauté - Financement des échéances de l'emprunt lié à l'acquisition d'un immeuble propre par l'APL - Versement direct au prêteur - Substitut de revenus entrant en communauté - La Cour de cassation confirme que les versements d'APL intervenus en cours d'union, directement de la CAF à l'établissement de crédit, pour le remboursement d'un emprunt ayant permis de financer l'acquisition d'un immeuble propre de l'époux, devaient, tel des salaires, être pris en compte pour le calcul de la récompense due par l'époux à la communauté. La Cour de cassation censure en revanche un arrêt d'appel pour avoir jugé que l'acquisition en cours d'union d'un véhicule par l'un des époux au moyen d'un emprunt dont les échéances auraient été remboursées par lui-même n'ouvrait pas droit à récompense au profit de la communauté. Les juges du droit lui reprochent de n'avoir pas recherché si lesdits remboursements avaient été effectués au moyen de fonds propres ou de fonds communs.
Cass. civ. 1re, 1er déc. 2021, n° 20-10.956 (V. annexe 2)
Régime matrimonial - Communauté - Droit à allocation compensatrice pour tierce personne (bien propre) - Sommes versées au titre de ce droit pendant le mariage (financement d'une dépense commune) - Dans le cadre de la liquidation de leur communauté intervenant à l'occasion de leur divorce, un conjoint bénéficiant de l'allocation compensatrice pour tierce personne considéra être créancier d'une récompense à l'égard de la communauté à raison de l'encaissement par elle de l'allocation pendant l'union. La Cour de cassation rejette ses prétentions en distinguant deux choses : 1° le droit à l'allocation compensatrice pour tierce personne, qui constitue un bien propre par nature, et 2° les sommes versées pendant le mariage en exécution de ce droit qui ne présentent pas un caractère exclusivement personnel et sont destinées à contribuer au financement d'une dépense commune à titre définitif. Dès lors, le conjoint n'est pas créancier d'une récompense à l'égard de la communauté pour les sommes encaissées par elle.
Cass. civ. 1re, 26 janv. 2022, n° 20-10.115 (V. annexe 3)
Communauté - Actif - Jouissance des fruits et revenus de biens propres - Prise en charge définitive des dettes qui en sont la contrepartie - Dépenses d'acquisition de matériel nécessaires à l'exploitation agricole propre d'un époux - La Cour de cassation rappelle que la jouissance des fruits et revenus de biens propres implique, pour la communauté, la prise en charge définitive des dettes qui en sont la contrepartie, et juge ainsi que n'ouvre pas droit à récompense au profit de la communauté le paiement, au moyen des revenus bruts d'une exploitation agricole propre à un époux, des dépenses résultant de la gestion courante de celle-ci, tels le remplacement d'un matériel amorti ou l'entretien des biens mobiliers ou immobiliers affectés à l'exploitation.
Cass. civ. 1re, 13 oct. 2021, n° 19-24.008 (V. annexe 2)
Communauté - Passif - Cautionnements des deux époux recueillis au sein du même acte - Annulation de l'engagement de l'un des époux - Portée sur l'autre engagement - Consentement exprès au cautionnement de l'autre conjoint (non) - La Cour de cassation juge que lorsque les cautionnements d'époux communs en biens ont été recueillis au sein du même acte pour garantir la même dette et que l'un des cautionnements est annulé, la seule signature au pied de cet engagement ne vaut pas consentement exprès au cautionnement de l'autre conjoint, emportant engagement des biens communs en application de l'article 1415 du code civil.
Cass. com., 29 sept. 2021, n° 20-14.213, X c/ Sté Banque populaire Alsace-Lorraine-Champagne (V. annexe 3)
Concubinage - Liquidation de l'indivision - Créances sur l'indivision - Dépenses de conservation - Cotisations d'assurance habitation - Échéances d'emprunt prises en charge par l'assurance - La Cour de cassation précise le champ d'application et le régime des indemnités à l'encontre de l'indivision que pourrait revendiquer un indivisaire sur le fondement de l'article 815-13 du code civil : seule la part du contrat d'assurance habitation qui garantit l'immeuble en cas de sinistre constitue une dépense de conservation ouvrant droit à indemnité à l'encontre de l'indivision au profit de l'indivisaire contributeur ; par ailleurs, l'indivisaire sinistré n'a aucun droit à créance contre l'indivision lorsque c'est l'assurance qui supporte l'intégralité des échéances d'emprunt restantes.
Cass. civ. 1re, 20 oct. 2021, n° 20-11.921 (IP 1-2022, n° 3, § 2)
Séparation de biens - Convention sur la preuve de la propriété dans le contrat de mariage - Collection de sculptures - Modes de preuve admissibles - Dans le cadre d'un contentieux successoral, la Cour de cassation rejette un pourvoi dirigé contre un arrêt d'appel ayant souverainement estimé qu'une collection de sculptures en étain, présente dans le logement du couple, était couverte par la présomption simple de propriété prévue en faveur de l'épouse en ces termes dans le contrat de mariage : « sont réputés la propriété exclusive de la future épouse, les meubles meublants, linge, argenterie et autres objets mobiliers quelconques qui garniront l'habitation commune ». Le contrat offrait à l'époux la faculté de renverser la présomption, en justifiant de son droit de propriété « par titre, factures de marchands ou tout autre moyen de preuve légale », ce qui semble trop restrictif par rapport aux prévisions de la loi.
Cass. civ. 1re, 23 juin 2021, n° 19-21.784 (V. annexe 2)
Divorce - Convention notariée réglant les conséquences du divorce (C. civ., art. 268) - Contentieux - Divisibilité du jugement contenant prononcé du divorce et de l'homologation de la convention - La Cour de cassation répond positivement à la question de savoir si un époux qui a signé la convention réglant tout ou partie des conséquences du divorce, pouvait retirer son consentement avant que l'homologation ne soit devenue définitive, et alors même que le prononcé du divorce l'était devenu. Elle réaffirme le principe selon lequel le juge ne peut homologuer la convention qu'en présence de conclusions concordantes des époux. Tel n'est pas le cas lorsque l'épouse a fait valoir en cause d'appel que la convention ne préservait pas suffisamment ses intérêts.
Cass. civ. 1re, 9 juin 2021, n° 19-10.550 (V. annexe 3)
#Auteur: Ilan¤ KHAYAT
#Qualités: Notaire à Croissy-sur-Seine
La règle d’imputation des libéralités consenties au conjoint survivant sur ses droits légaux anime régulièrement les colonnes des revues scientifiques, et ce, avec une acuité renouvelée depuis la réforme du 23 juin 2006, qui a restauré cette règle par l’article 758-6 du code civil. Les premiers commentateurs de la réforme ont vu dans cet article un texte impératif (V. § 5), tandis qu’une doctrine critique à l’égard de cette analyse s’est ensuite appuyée, pour prendre son contrepied, sur une jurisprudence ouverte (V. § 6).
Une lecture des travaux parlementaires de la loi du 23 juin 2006 et la finalité différente des deux dispositifs contenus dans l’article 758-6 du code civil, l’imputation en premier lieu, organisant un rapport successoral atypique, spécifique au conjoint, puis le plafonnement en second lieu, comme outil de protection de la réserve héréditaire, autorisent selon nous la reconnaissance d’un statut supplétif de volonté pour le premier (V. § 11), lorsque l’impérativité serait réservée au second (V. § 9).
Alors que la méthode légale de calcul des droits du conjoint survivant en pleine propriété contient une protection intrinsèque de la réserve héréditaire même en cas de cumul des vocations légale et libérale par dérogation à la règle d’imputation (V. § 15), la règle impérative du plafonnement constituera son seul rempart face au risque d’excès d’une vocation légale universelle en usufruit cumulée avec une libéralité en pleine propriété (V. § 20).
Si la reconnaissance de la faculté de déroger à la règle d’imputation est essentielle pour la cohérence de la matière, mais aussi pour l’ingénierie patrimoniale, la clause dérogatoire ne doit pas être systématique : le conseil patrimonial la préconisera avec clairvoyance, souvent après la réalisation d’un audit patrimonial (V. § 31).
Communauté - Deniers provenant du patrimoine propre d'un époux - Droit à récompense - Financement de la contribution aux charges du mariage - La Cour de cassation juge que selon l'article 1433 du code civil, il incombe à celui qui demande récompense à la communauté d'établir que les deniers provenant de son patrimoine propre ont profité à celle-ci ; sauf preuve contraire, le profit résulte notamment de l'encaissement de deniers propres par la communauté, à défaut d'emploi ou de réemploi. Cet arrêt, non publié au Bulletin, semble trancher une question de fond en considérant qu'en régime de communauté, le financement par des deniers propres de dépenses relevant de la contribution aux charges du mariage génère un droit à récompense au profit de l'époux financeur.
Cass. civ. 1re, 14 avr. 2021, n° 19-20.591 (V. annexe 2)
Séparation de biens - Apport personnel en capital pour financer l'acquisition indivise du logement de la famille - Contribution aux charges du mariage (non) - Lorsqu'un époux séparé de biens finance l'acquisition indivise (50/50) d'un immeuble de jouissance par le couple, l'époux contributeur peut faire valoir une créance à l'égard de l'autre époux. Parmi les fondements possibles du flux financier en question pouvant empêcher la caractérisation d'une telle créance figure l'exécution par l'époux contributeur de sa contribution aux charges du mariage. La Cour de cassation juge qu'un tel fondement n'est pas admissible dans l'hypothèse où l'époux n'a pas contribué en assumant le remboursement progressif d'un emprunt au moyen de ses deniers personnels, mais a réalisé un apport en capital au moyen de tels fonds.
Cass. civ. 1re, 17 mars 2021, n° 19-21.463 (V. annexe 4)
Divorce - Liquidation d'un bien indivis - Apport en capital par un époux - Dépense de conservation ouvrant droit à indemnité à l'encontre de l'indivision (non) - Dépense d'acquisition générant une créance entre époux (oui) - La Cour de cassation qualifie de dépenses d'acquisition l'apport de deniers personnels par un époux pour l'acquisition d'un bien indivis, et non plus de dépenses de conservation. Ce revirement modifie substantiellement le régime des restitutions entre coïndivisaires lors de la liquidation du ou des biens indivis. Est désormais exclue la restitution à laquelle l'époux apporteur pouvait prétendre en application du régime des indemnités à l'encontre de l'indivision organisé par l'article 815-13 du code civil. Toutefois, si l'époux justifie que son apport de deniers personnels finance la part de son conjoint dans l'acquisition d'un bien indivis, il peut invoquer à son encontre une créance entre époux. Cet arrêt entraîne de nouveaux points de vigilance pour le liquidateur et amène à proposer des solutions pour en anticiper les conséquences.
Cass. civ. 1re, 26 mai 2021, n° 19-21.302 (V. annexe 6)
#Auteur: Ilan¤ KHAYAT
#Qualités: Notaire à Croissy-sur-Seine
#Auteur: Réda¤ BEY
#Qualités: Notaire à Croissy-sur-Seine
L’avantage matrimonial est un outil précieux pour adapter le régime matrimonial aux préoccupations de certains chefs d’entreprise (V. § 2) : prétendre à un esprit participatif, tout en limitant son étendue en cas de divorce (V. § 5). La doctrine et la pratique se sont employées à créer un régime répondant à ces attentes : le régime de la participation aux acquêts avec clause d’exclusion des biens professionnels. Une jurisprudence récente a toutefois condamné ce type de clauses au nom de la révocation automatique des avantages matrimoniaux par le divorce. La possibilité de déroger à cette règle restant discutée (V. § 17), la prudence incite à privilégier des solutions alternatives qui, bien qu’imparfaites, assurent l’exclusion des biens professionnels de l’enrichissement commun (V. § 27, 29 et 41), tout en préservant un esprit participatif plus ou moins prononcé (V. § 22, 35, 38 et 44).