Laurent CYTERMANN
Maître des requêtes au Conseil d'État
Maître des requêtes au Conseil d'État
Annexe 4 : CE, 3e et 8e ch., 19 avr. 2022, n° 442234 et 442236, Sté Gemar Lumitec, concl. L. Cytermann
Droit de l'Union européenne - Harmonisation - Directive mère-fille - Non-conformité de l'ancien précompte mobilier français - Sur renvoi préjudiciel du Conseil d'État (CE, 23 oct. 2020, n° 442224 et 442248, Sté Schneider Electric et a., concl. K. Ciavaldini : FI 1-2021, n° 5, § 1, comm. T. Perrot), la CJUE juge que l'article 4, § 1 de la directive 90/435/CEE s'oppose à une réglementation nationale qui prévoit qu'une société mère est redevable d'un précompte en cas de redistribution à ses actionnaires de bénéfices versés par ses filiales, donnant lieu à l'attribution d'un avoir fiscal, lorsque ces bénéfices n'ont pas supporté l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun, dès lors que les sommes dues au titre de ce précompte dépassent le plafond de 5 % prévu à l'article 4, § 2 de cette directive. Une telle réglementation ne relève pas de l'article 7, § 2 de ladite directive. On remarquera par ailleurs que le gouvernement français avait invoqué les travaux préparatoires de la directive 90/435, mais la Cour les a écartés au point 69 en rappelant que les intentions exprimées par les États membres au sein du Conseil de l'Union européenne sont dénuées de valeur juridique lorsqu'elles n'ont pas trouvé leur expression dans les dispositions légales. Ces dernières sont en effet destinées aux justiciables qui doivent pouvoir se fier à leur contenu, conformément aux exigences du principe de sécurité juridique.
CJUE, 2e ch., 12 mai 2022, C556/20, Schneider Electric SE, Axa SA, BNP Paribas, Engie SA, Orange SA, L'Air Liquide, concl. J. Kokott (V. annexe 5)
Liberté d'établissement - Libre circulation des capitaux -
Retenue à la source prélevée sur des intérêts fictifs d'un prêt consenti entre sociétés d'États membres différents - Compatibilité - La CJUE a été saisie de plusieurs questions préjudicielles concernant un prêt convertible sans intérêts, dont la date d'échéance était fixée à 60 années, consenti par une société de droit luxembourgeois à une société de droit bulgare. L'administration fiscale bulgare a estimé que l'opération donnait lieu à une évasion fiscale et a soumis les intérêts, calculés selon le taux de marché, à une retenue à la source. La CJUE juge que : 1° l'article 1er, § 1 de la directive intérêts-redevances (2003/49/CE, 3 juin 2003), lu en combinaison avec l'article 4, § 1, d) de cette directive, l'article 5 de la directive mère-fille (2011/96/UE, 30 nov. 2011 modifiée), ainsi que les articles 3 et 5 de la directive 2008/7/CE du 12 février 2008 concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux, ne s'opposent pas à une réglementation nationale qui prévoit la taxation sous la forme d'une retenue à la source des intérêts fictifs qu'une filiale résidente ayant bénéficié d'un prêt sans intérêts octroyé par sa société mère non résidente aurait, selon les conditions de marché, été tenue de verser à cette dernière ; 2° l'article 63 TFUE, lu à la lumière du principe de proportionnalité, ne s'oppose pas à une réglementation nationale qui prévoit la taxation sous la forme d'une retenue à la source des intérêts fictifs qu'une filiale résidente ayant bénéficié d'un prêt sans intérêts octroyé par sa société mère non résidente aurait, selon les conditions de marché, été tenue de verser à cette dernière, lorsque cette retenue à la source s'applique au montant brut de ces intérêts, sans possibilité de déduction, à ce stade, des frais liés à ce prêt, l'introduction ultérieure d'une demande en ce sens étant nécessaire en vue du recalcul de ladite retenue et d'un éventuel remboursement, pour autant que, d'une part, la durée de la procédure prévue à cette fin par cette réglementation ne soit pas excessive et, d'autre part, des intérêts soient dus sur les montants remboursés.
CJUE, 5e ch., 24 févr. 2022, C-257/20, Viva Telecom Bulgaria EOOD, concl. A. Rantos (V. annexe 5)
Aide d'État - Prix de transfert - Principe de pleine concurrence - Décision fiscale anticipée (ruling) - L'avocat général prononce ses conclusions dans l'affaire Fiat Chrysler et prend position sur le fondement juridique de la prise en compte du principe de pleine concurrence dans le contrôle des aides d'État en matière fiscale, question déterminante dans la capacité de la Commission européenne à contrôler les prix de transfert intragroupe.
CJUE, concl. avocat général Pikamäe, 16 déc. 2021,, C-885/19 (ECLI:EU:C:2021:1028) et C-898/19 (ECLI:EU:C:2021:1029)
Annexe 2 : CE, 3e et 8e ch., 28 sept. 2021, n° 432579, Min. c/ Wajsbrot, concl. L. Cytermann
Aides d'État - Régime d'aides - Qualification - Pratique administrative constante - Décisions fiscales anticipées - La CJUE juge qu'une pratique administrative constante, en l'espèce relative à des décisions fiscales anticipées en matière de prix de transfert, peut être regardée comme un régime d'aides d'État.
CJUE, 4e ch., 16 sept. 2021, C-337/19 P, Commission c/ Belgique et Magnetrol International (V. annexe 5)
Annexe 4 : CE, 3e et 8e ch., 21 juin 2021, n° 439354, Min. c/ Claret, concl. L. Cytermann
Annexe 4 : CE, 3e et 8e ch., 26 janv. 2021, n° 429381, Tribel, et n° 429410, Min. c/ Tribel, concl. L. Cytermann
Le Conseil d’État, dans l’affaire Min. c/Conversant juge, en matière d’IS, que pour avoir un établissement stable en France au sens des stipulations de la convention fiscale franco-irlandaise, une société résidente d’Irlande doit soit disposer d'une installation fixe d'affaires par laquelle elle exerce tout ou partie de son activité, soit avoir recours à une personne non indépendante exerçant habituellement en France des pouvoirs lui permettant de l'engager dans une relation commerciale ayant trait aux opérations constituant ses activités propres. Doit être regardée comme exerçant de tels pouvoirs, ainsi d’ailleurs qu’il résulte des § 32.1 et 33 des commentaires au modèle de convention établi par l’OCDE publiés respectivement le 28 janvier 2003 et le 15 juillet 2005, une société française qui, de manière habituelle, même si elle ne conclut pas formellement de contrats au nom de la société irlandaise, décide de transactions que la société irlandaise se borne à entériner et qui, ainsi entérinées, l’engagent.
#Auteur: Laurent¤ CYTERMANN
#Qualités: Maître des requêtes au Conseil d’État1
L’arrêt Apple rendu le 15 juillet 2020 par le Tribunal de l’Union européenne confirme le cadre juridique et de raisonnement dans lequel s’inscrit la décision de la Commission (V. § 4 à 10). Les méthodes mises en œuvre par la Commission pour déterminer le résultat imputable aux succursales irlandaises des filiales d’Apple sont en revanche toutes invalidées, en dépit du pouvoir discrétionnaire exercé par les autorités fiscales irlandaises (V. § 18) et du caractère « lacunaire et parfois incohérent » des décisions litigieuses (V. § 26), pourtant reconnu par le Tribunal. Le pourvoi formé contre cet arrêt pourrait permettre à la Cour de justice de l’Union européenne de réexaminer l’équilibre de la charge de la preuve dans ce type d’affaire (V. § 25 à 27) et de mieux tenir compte des schémas d’optimisation fiscale dans lesquels s’inscrivent les rulings en débat (V. § 23 et 24).
Annexe 4 : CE, 3e et 8e ch., 9 juin 2020, n° 418913, Sté Gervais Smaniotto Industries (GSI), concl. L. Cytermann
Annexe 7 : CE, 3e et 8e ch., 24 avr. 2019, n° 412284, Sté Gemar Lumitec, concl. L. Cytermann
Annexe 8 : CE, 3e et 8e ch., 24 avr. 2019, n° 413129, Sté Control Union Inspections France (CUIF), concl. L. Cytermann